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jeudi, 05 avril 2012 14:00

Eglise, veux-tu te laisser ressusciter ?

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En ce temps de Pâques, pas un membre du clergé ou de la hiérarchie n'aura laissé passer l'occasion d'annoncer l'Evangile de la Résurrection, parole d'une actualité étonnante, dans notre monde qui trop souvent manque de souffle. Il y a là, en effet, un urgent besoin : que ce soit en politique où l'on constate, hélas ! que la gestion, voire tout simplement la finance, remplace trop facilement le bien de la « chose publique », comme aimaient à la nommer les Anciens ; que ce soit dans l'institution Eglise, où le repli sur des positions dogmatiques et cléricales freinent considérablement l'élan de tant de laïcs qui s'engagent sans compter pour que la Parole soit annoncée.

D'aucuns, ces derniers jours, ont une nouvelle fois réclamé la tenue d'un nouveau Concile. Souhait pieux s'il en est, à moins qu'il ne camoufle celui de revenir officiellement en arrière. Or avant de penser à un Vatican III, ne devrait-on pas se préoccuper de faire passer les idées maîtresses de Vatican II ? Il est particulièrement intéressant de lire dans ce numéro[1] le commentaire de Reto Dörig, un agent pastoral qui n'était pas né à l'époque du Concile et qui s'étonne du souffle qu'il sait trouver dans ces pages lumineuses que Vatican II nous invite à mettre en pratique. Tout en en relevant la difficulté, voire le manque de communication entre les différents partenaires dans l'Eglise. Il me fait automatiquement penser à ces prêtres du même âge qui s'enferment dans l'autorité que leur ministère leur octroie, pour casser toute initiative de celles et de ceux qui sont aussi en « ministère » dans l'Eglise, mais qu'ils considèrent leur devant obéissance.

Comment en est-on arrivé là ? A ne plus savoir s'émerveiller de nos différences et à ne faire que s'énerver de nos diverses façons de vivre de Jésus-Christ ? Comme dernièrement dans le diocèse du Valais, où un, puis plusieurs animateurs pastoraux se sont fait virer par la hiérarchie, sans aucune rencontre préalable avec l'évêque. Lorsqu'on en vient à faire valoir l'obéissance comme premier critère de service dans l'Eglise et qu'on l'utilise pour asseoir le pouvoir clérical (qui ne peut donc se partager avec des non-clercs !), on peut vraiment se demander où est passé la Parole du Christ, qui continue de clamer au milieu de nos tempêtes : « N'ayez pas peur ! » A croire qu'on en reste au Vendredi Saint, le jour de la mise à mort !

Chez tant de laïcs femmes et hommes, assistants pastoraux ou catéchistes bénévoles, animateurs spontanés de liturgies avec ou sans prêtres, choristes, lecteurs, servants de messe, aumôniers d'hôpitaux ou de maisons de personnes âgées, visiteurs de prison, engagés dans les multiples organismes au service des plus pauvres ou des isolés, se pose la question : l'Eglise veut-elle se laisser ressusciter par le Christ ? -Eux, ils y répondent par leur engagement de vie.[2] Avec eux, elle est belle cette Eglise, vivante et sainte ! Hélas ! l'encouragement qu'ils pourraient attendre de la hiérarchie n'est pas toujours là, qui leur permettrait de comprendre que nous faisons un seul Corps dans le Christ.

Certes, ce repli sur des positions autoritaires et cléricales se ressent dans bien d'autres milieux. On en trouve parfois des traces dans les révolutions arabes, où l'islamisme forcené est surtout un cléricalisme caché. Et que dire de la tendance évidente du gouvernement israélien actuel, qui, sous couvert de sécurité, annonce une judaïsation progressive et délibérée de l'Etat d'Israël, avec toujours et encore ce même amalgame entre le religieux et le politique. Les historiens israéliens sont de plus en plus nombreux à le dénoncer, dépistant cette ambiguïté voulue déjà chez les fondateurs du sionisme.[3] Pour eux, ce mélange entre judaïsme et israélisme va conduire la société israélienne à l'effritement. Les réactions à cette évolution tardent à se faire sentir du côté des partis non gouvernementaux, qui peinent à trouver des candidats d'opposition valables. Pour combien de temps encore ?

Faut-il avoir peur de cette fermeture progressive sur des positions anciennes ? Certes non ! Il suffit de se souvenir que Pâques, c'est d'abord le constat d'un tombeau vide du passé et la fête d'une Parole qui nous envoie à l'aventure de ce toujours nouveau que l'Evangile appelle re-suscité !

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