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samedi, 10 mars 2018 16:27

Tremblements et lueurs

À l’occasion de la publication du Manuscrit de Namur, œuvre d’un miniaturiste anonyme du XIVe siècle consacrée à l’Apocalypse de Jean, un colloque interdisciplinaire s’est tenu en 2016 à Namur. Il a donné des clefs pour aborder l’apocalypse. Un nom qui, hélas, est devenu synonyme de catastrophe, alors qu’il se veut porteur d’espérance.

Monique Desthieux, Genève, théologienne

Joël Rochette et Dominique Lambert (éd.),
Lueurs d’Apocalypse. Imaginaire et recherche autour du manuscrit de Namur (XIVe siècle),
Namur, Lessius 2017, 224 p.

Dans ces actes du colloque de Namur, se croisent les regards de l’exégèse, de la théologie, de la philosophie et de l’histoire de l’art sur l’Apocalypse. Des chercheurs de différentes disciplines montrent la grande actualité de cet écrit qui, en nos temps troublés, donne bien des raisons d’espérer et de se réjouir.

Une première partie est consacrée aux récits apocalyptiques de la Bible, apparus essentiellement entre le IIIe siècle av. J.-C. et le IIe siècle. Cette littérature est une littérature de « révélation » du Royaume de Dieu et du salut promis. Ainsi le dévoilement est-il progressif dans le dernier livre de la Bible et conduit à plusieurs interprétations possibles. La plus courante affirme que le livre était une description codée de la situation périlleuse des chrétiens au Ier siècle et une exhortation à tenir bon dans la foi. Une autre y voit une grande métaphore des combats de la vie spirituelle au cœur de l’existence de chaque croyant.

Pour Jean Roch, recteur du Grand Séminaire de Namur, la lecture la plus féconde met en relief l’accomplissement des prophéties en la personne de Jésus-Christ, tel le déploiement de l’Alliance dans toutes les périodes de l’histoire et dans chacune de nos vies. Car si l’Apocalypse a été écrite avant tout pour des communautés, en particulier pour les « sept Églises », afin qu’elles retrouvent une santé psycho-spirituelle nouvelle, le livre peut aussi s’adresser à des chrétiens individuels.

Une série impressionnante de malheurs accablant le monde et l’humanité sont décrits avec force détails. Le symbolisme animalier est d’un grand secours pour rendre la terrible violence dont l’homme est capable. Parallèlement à cette spirale « infernale », l’auteur déploie un contre-feu afin de désamorcer la peur dans le cœur du croyant. Il s’agit non pas de supprimer celle-ci, mais de la gérer, de l’assumer et de la dépasser, par un élan de persévérance et de confiance. Jean ne disait-il pas à ses lecteurs : « Moi, Jean, votre frère, en communion avec vous dans la tribulation, et la royauté, et la persévérance en Jésus» (1,9) ? La foi en le Christ, roi et Seigneur vainqueur, permet aux croyants de garder l’espérance et de tenir dans l’épreuve.

L’Apocalypse de Jean a inspiré bien des artistes. Le livre, il est vrai, offre de nombreuses figures propices à l’iconographie : l’Agneau immolé, le Christ en gloire, la femme enrobée de soleil, saint Michel et le dragon, la Jérusalem céleste… Lueurs d’Apocalypse, du reste, est lui-même agréablement illustré.

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