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lundi, 06 octobre 2008 02:00

Et si la paix n'était pas un rêve !

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On m'a toujours appris que la paix était don de Dieu, mais j'ai dû constater avec les années que si nous ne faisons pas grand-chose sans Dieu, Dieu de son côté ne fait rien sans nous ! Certes, les initiatives pour la paix n'ont pas manqué tout au long de l'Histoire, tout spécialement ce dernier siècle en Occident. Mais de Solferino aux Conventions de Genève, du Droit international humanitaire au Droit d'ingérence, les résolutions des organismes internationaux chargés d'instaurer un climat de paix entre les individus, les groupes humains ou les Etats ont systématiquement abouti à accroître la violence, le respect de la souveraineté des Etats paralysant trop souvent l'action humanitaire.[1] Est-ce à désespérer du travail de l'ONU, gênée dans son efficacité par l'argent reçu des Etats membres et tout spécialement du plus riche d'entre eux, les Etats-Unis ?

Or nous voici à la veille de quitter l'ère Bush (l'avenir nous dira si on peut la qualifier autrement qu'une ère de guerre et de récession économique et morale). Quels lendemains les élections américaines présagent-elles pour le monde ? A lire plus loin l'article de Matt Malone, jésuite de New-York, on sent qu'on n'est pas prêt, ni chez les démocrates ni chez les républicains, à prendre le chemin de la paix ! Même les catholiques étasuniens, que vise le candidat démocrate Obama, ont tendance à voter selon leur statut socio-économique plutôt que selon leur foi. Quant au candidat républicain McCain, il s'est choisi comme co-listière une amatrice d'armes qui s'engage pour le maintien de la guerre et insiste sur la manière dont elle s'est battue pour imposer les valeurs américaines au reste du monde ! Quel saint invoquer, pour reprendre la suggestion pleine d'humour de Jerry Ryan, pour obtenir une aide efficace en vue de la paix ?

Plus qu'une demande à rajouter au catalogue des voeux pieux, la paix est au centre du message évangélique. L'invitation de Jésus a transformé l'attente messianique : ce n'est plus seulement de Dieu que nous avons à espérer le chamboulement de nos habitudes guerrières, mais d'un acte conscient et délibéré qui change notre être profond : « Heureux les artisans de paix. » De tout temps, des femmes et des hommes ont risqué leur vie au service du meilleur qui se cache au coeur de tout être humain, son désir de paix. Le dernier en date, je l'ai rencontré dans un pays en guerre depuis plus de 60 ans, Israël, et il vient de s'éteindre dans un abandon complet. Il s'appelait Abie Nathan. Il était né en Iran et, comme notre père Abraham, s'était installé en Terre sainte parce que ses études dans un collège catholique en Inde, où il avait grandi, l'avaient initié aux belles histoires bibliques et que lui aussi était juif.

Héros de la Royal Air Force pendant la Deuxième Guerre mondiale, puis brillant pilote de chasse dans l'aviation de Tsahal, il découvre qu'il fait fausse route et que la violence ne mène à rien. Il opte alors pour des gestes symboliques - de vraies « paraboles » - armant un bateau d'un puissant émetteur de radio, La Voix de la paix, pour lancer en anglais, arabe, français et hébreu, à tous les pays du Proche-Orient, des messages de coexistence et des conseils pour la mettre en pratique. Il survole dans son petit avion blanc, peinturluré du mot PAIX, l'Egypte du président Nasser pour l'inviter à ne pas faire la guerre. Il est au retour emprisonné par les siens. Voyant son pays s'enfoncer dans un colonialisme primaire, il multiplie les actions contre les colonies sauvages et pour une politique de la main tendue, même avec les adversaires, allant jusqu'à rencontrer Yasser Arafat, violant ainsi la loi israélienne qui interdit tout contact avec l'ennemi. En prison, il entreprend une grève de la faim pour protester contre la loi interdisant aux gens de son pays de rencontrer les « autres », ceux de l'OLP par exemple. Comble d'insolence, ce sont les mêmes politiques qui l'exécraient de son vivant, qui se dépêchèrent à sa mort de lui dresser une couronne de louanges?

Sans des fous sympathiques comme Abie Nathan, j'en serais, comme tant d'autres en Israël surtout, à attendre encore le Messie. Je préfère croire qu'Il est déjà là, et que malgré ce qu'on lui a fait subir, Il est toujours vivant.

1 - Voir l'article de Paul Grossrieder, aux pp. 21-24 de ce numéro.

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