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vendredi, 15 mai 2020 13:45

Ouvertures africaines

carte afrique CC: Martin23230/wikimediasTout est parti d'une phrase d'un ami burkinabé: «Ce que vous appelez avec des noms compliqués Montessori, Freinet et Dewey nous le vivons ici au quotidien, dehors, avec nos enfants, le quartier.» Interpellée par le sarcasme, j'ai voulu creuser.

Felwine Sarr, écrivain et économiste sénégalais, souligne que «les représentations négatives sur l’Afrique sont si ancrées qu’on ne prend même plus la peine de regarder la réalité. Et quand la réalité présente va à l’encontre des représentations, on les déplace alors dans le temps futur. Même si le continent s’en sort plutôt bien, il faut donc prédire une catastrophe». Je m’interroge sur la manière dont aujourd’hui encore subsiste une représentation qui relève d’instrumentalisation cachée.

La carte du monde à dimensions réelles est bien différente de ce que nous avons nous-mêmes appris à l’école. Dans une Europe qui est réellement toute petite et qui se cherche, il me paraît que le continent africain nous inspire des chemins de renaissance.

La notion de Ubuntu, issue des langues bantoues et relevant du panafricanisme, nous appelle à réconcilier humanité et fraternité. Dans un climat d'individualisme exacerbé, cette responsabilité humaniste universelle est la sève de vie à réinvestir. L'Afrique vient solliciter une inventivité et une créativité normalisées, triées, sectorisées et difficilement reconnues dans l’universalité en Occident. Ce continent ré-ouvre la porte à l’art de la liberté.

Sur le plan culturel, l’Afrique est un ferment extraordinaire de talents. Fatoumata Diawara, Angélique Kidjo, Blick Bassy, Patrick Kabré et d’autres le montrent bien. La persévérance et le courage de leur message doivent nous secouer et nous mener vers des sentiers à arpenter, non encore parcourus. L’expérience de vie se transmet sur ces terres aussi par l'oralité, un langage poétique mais ancré, proche de la corporalité, de la nature. Une réalité à réincarner.

Un rapport au savoir inspiré: face à sa marchandisation et à la pression répandue de la concurrence sur l’apprentissage, le continent nous invite aussi à retisser un rapport personnel, un discernement et une acuité intellectuelle à transformer en vérité au service de l'humain. Ce que Nelson Mandela incarnait déjà dans sa manière de concevoir l'éducation et la culture. Il nous invite aussi à nous ouvrir à l'authenticité, qui dévoile le monde avec et pour les autres. Celle-ci n'exclut pas les conflits, mais elle ouvre au courage de les affronter et permet d'y voir une occasion pour grandir, ensemble. Merci l'Afrique de nous le rappeler.

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