Ce n’est pas là le seul intérêt de cet ouvrage, à la fois très accessible et très documenté, qui ne se contente pas de brosser le portrait d’une époque et d’une figure du passé. En citant de nombreux discours et prédications, l’auteur parvient si bien à transmettre la flamme qui animait Martin Luther King que le lecteur est renvoyé à lui-même et à son... manque de foi et d’audace. Celui-ci se sent d’autant plus concerné que Molla, spécialiste de la tradition africo-américaine, élargit le propos en posant cette question: le rêve d’égalité et de fraternité énoncé dans un fameux discours de 1963 («I have a dream») est-il devenu réalité en 2018? Le dernier chapitre de l’ouvrage montre que, aux États-Unis tout au moins, l’heure est plutôt au désenchantement. Les nombreux meurtres de jeunes Noirs abattus par la police ces dernières années prouvent qu’il ne suffit pas de voter des lois pour en finir avec une tradition séculaire de «destruction du corps noir».