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L e
t o u r i s me
c h a ma n i q u e
e n
A ma z o n i e
supplanté au Pérou celui de curandero pour désigner les guérisseurs. Parmi les quelques grands chamanes liés au développement de ce secteur, on trouve des Péruviens, des étrangers (en particulier nord-américains), des autochtones et des métis. Et même un Français, Jacques Mabit, connu pour soigner des toxicomanes dans son centre thérapeutique de Tarapoto. Ces catégories n’ont pas une valeur absolue puisqu’elles servent essentiellement aux acteurs à se positionner au sein du marché de l’ayahuasca. Ainsi la mise en avant d’une identité ethnique « autochtone » par des guérisseurs labellisés comme « métis » peut-elle servir à légitimer des connaissances approfondies dans le domaine de la médecine « traditionnelle » et permettre d’occuper une place éminente sur le marché de la guérison chamanique. Guillermo Arévalo, par exemple, grand entrepreneur chamanique d’Iquitos, appartient à l’« ethnie » shipibo, ellemême réputée pour le pouvoir de ses chamanes. Le chamanisme amazonien, loin de sa facture « traditionnelle » décrite par les anthropologues - des chamanes vivant dans des communautés ancestrales et ne soignant que des autochtones -, a vu sa pratique se transformer avec des nouveaux entrants dans le secteur. Les « métis » tout d’abord, apparus sur le marché de l’ayahuasca lors du boom du caoutchouc (fin XIXe-début XXe), suivis ensuite par des Occidentaux, qui ont commencé leur carrière en servant de guides aux routards désireux de se lancer à la découverte de la jungle amazonienne.
7 • Cf. le reportage d’Envoyé spécial, « Voyages chamaniques », diffusé par France 2 en 2008, où l’on voit une touriste française « possédée » se déplacer comme un jaguar.
Se trouvant à la tête de vastes campements, ces grands entrepreneurs chamaniques réalisent aujourd’hui de confortables profits en accueillant les touristes à des tarifs très élevés (de 50 à 170 dollars par jour), qui contrastent avec les faibles salaires accordés aux chamanes et aux employés péruviens qui travaillent sous leurs ordres. A côté de ces « chamanes operators », il existe une masse de « guérisseurs » de moindre importance, tant étrangers que Péruviens, qui ne sont pas parvenus à édifier un campement et qui vivotent en soignant quelques rares touristes étrangers et surtout une masse de Péruviens ne disposant que de faibles ressources.
Les touristes
Tout comme la notion de chamane, celle de touriste est elle-même une création de la filière du chamanisme amazonien, les soi-disant touristes ne se voyant pas comme tels en général. Les chamanes en distinguent trois sortes. Les mystiques ou « psychonautes », venus en Amazonie pour se lancer dans l’exploration d’eux-mêmes.7 Les patients, ensuite, qui se rendent dans ces centres chamaniques pour guérir de maux de toute sorte, tant organiques que psychiques. Ils comptent parmi eux beaucoup de personnes stressées et des malades en phase terminale, débarquant en Amazonie lorsque tout a été essayé par ailleurs. Comme le déclarent les chamanes : « Vous autres, Occiden taux, vous avez la richesse, nous au tres, chamanes péruviens, nous avons la sagesse », ce qui revient à considérer que, d’une certaine façon, c’est le « Sud » qui soigne le « Nord ».
société
15
avril 2014
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