P o l i t i q u e c a r c é r a l e » Le nouveau Code pénal suisse vise pourtant à favoriser des punitions qui ne désinsèrent pas le condamné. Il fait, en règle générale, obligation aux juges d’infliger des peines autres que l’emprisonnement pour des condamnations de moins de six mois. Or un quart des prévenus sont condamnés à Genève à des peines de prison, contre 10 % en moyenne en Suisse (statistiques 2012). Le Ministère public genevois convertit parfois des amendes en jours de prison, alors qu’une conversion en travail d’intérêt général devrait être favorisée. » Une autre raison du surpeuplement de Champ-Dollon, c’est la nouvelle politique du canton vis-à-vis des sanspapiers. Pendant longtemps, le gouvernement genevois a défendu leur cause, demandant même à Berne leur régularisation. Mais depuis que Pierre Maudet dirige le Département de la sécurité (2012), les processus de régularisation des sans-papiers sont bloqués. La Loi sur les étrangers est à présent fermement appliquée à Genève. Selon cette loi, les demandeurs d’asile déboutés et les sans-papiers doivent quitter le territoire national. S’ils ne le font pas volontairement, ils doivent être placés en détention, en vue de leur refoulement.3 Or le Centre de Fram bois4 affiche une capacité d’accueil de seulement 20 places pour trois cantons (Genève, Vaud et Neuchâtel). Par rapport aux 30000 sans-papiers de Suisse romande, c’est évidemment insuffisant ! C’est la raison pour laquelle nombre de ceux qui se font arrêter à Genève se retrouvent à Champ-Dollon, en préventive, sur condamnation pénale et non administrative. C’est une aberration du système puisqu’on sature la prison avec des individus qui devraient simplement être expulsés. » La justice pénale joue un rôle de voirie sociale : les délinquants sont perçus comme des déchets et la prison comme une poubelle. Cette politique carcérale résulte d’un choix de société qui déshumanise les délinquants et assimile les étrangers sans-papiers à des criminels. » Au vu de la situation de crise que connaît Champ-Dollon, que proposezvous pour désengorger la prison ? « Il faut faire sortir de prison les détenus non dangereux, en premier lieu les sans-papiers dont le seul délit est de ne pas être en règle sur le plan administratif. Le gouvernement genevois n’a jusqu’à présent pas voulu fournir de chiffres précis sur les motifs de détention à Champ-Dollon. Cependant, je peux affirmer de sources sûres, mais non officielles, que 15 % des détenus qui s’y trouvaient en janvier l’étaient uniquement pour violation de la Loi sur les étrangers. Et rien qu’en février 2014, 16 nouveaux détenus enregistrés à Champ-Dollon (sur 150) l’étaient pour ce seul motif. Je parle bien d’étrangers qui ont peut-être des antécédents, mais qui ne sont emprisonnés cette fois-ci que pour être demeurés illégalement en Suisse. » Il faudrait aussi faire sortir de ChampDollon ceux qui s’y trouvent en exécution de peine pour des infractions qui ne mettent pas en danger la vie des autres, ou les détenus qui n’ont pas payé des amendes, bref tous ceux qui sont là pour des infractions, réelles, certes, mais pour lesquelles la prison ne s’impose pas. » 3 • Suite à la votation populaire de décembre 1994 qui a légalisé les mesures de contrainte dans le cadre de la Loi sur les étrangers. (n.d.l.r.) 4 • Premier centre concordataire entièrement dédié à l’application des mesures de contrainte, créé en 2004. (n.d.l.r.) société 19 avril 2014 choisir