Voir un film chez soi, Covid oblige, même sur le grand écran d’un home-cinéma, n’a rien à voir avec le fait de sortir, de retrouver sa salle de cinéma, de faire la queue, prendre son billet, assister à la projection en compagnie d’un public à chaque fois différent dont les réactions apportent convivialité et partage bienvenus. Devant les cinémas fermés, il reste la mémoire pour revivre nostalgiquement quelques-uns de ces moments magiques passés dans les salles obscures.
Ma première projection a eu lieu en Valais. Dans ce canton catholique empreint de Contre-Réforme et dont les autorités ne négligeaient pas le pouvoir temporel de l’Église et sa capacité de censure -nous sommes en 1952-, le cinéma était souvent vu comme une opération du Diable.
«En politique le choix est rarement entre le bien et le mal, mais entre le pire et le moindre mal. (…) Il faut estimer comme un bien le moindre mal», écrivait il y a quelque cinq siècles Nicolas Machiavel. Cette affirmation du penseur florentin (1469 - 1527) n’a pas pris une ride. On a pu l’expérimenter quand les Français, en 2002, ont dû prendre parti entre Jacques Chirac et Jean-Marie Le Pen, et aujourd’hui quand les Américains ont fait leur choix entre Joe Biden et Donald Trump.
La vision déiste de l’État a un long passé derrière elle, tandis que celle de la laïcité n'a à son actif qu'une histoire bien courte encore. Dans l’Antiquité déjà, croyants, athées et agnostiques voyaient leurs choix acceptés que dans la mesure où ils respectaient le culte des ancêtres et les règles de la Polis ou de l’Urbs. Les Romains cependant, qui avaient leurs propres dieux, laissaient les peuples occupés et assujettis libres de célébrer leurs croyances dans la mesure où celles-ci ne troublaient pas l’ordre public. Plus tard, au début de notre ère, deux des trois religions monothéistes ont imposé leurs pensées théologiques, le christianisme pendant 14 siècles et l’islam pendant 12 siècles.
Certains voient dans la Covid-19 la main de Dieu. Mais pourquoi, dans une situation émotionnelle majeure, faire référence à l’Invisible, à l’Inatteignable? Lors des «cas de force majeur», les anglo-saxons utilisent l’appellation Act of God (le fait de Dieu).
Quand l’être humain utilise «Dieu» à toutes les sauces, selon ses besoins, ses désirs ou ses peurs. Un article de Gérald Morin, paru initialement dans le numéro de juillet de CultureEnJeu.
«La complexité inextricable des causes et des effets n’est maîtrisable par personne.
Le hasard vient nécessairement contrecarrer les projets les mieux établis.»
Friedrich Dürrenmatt