Dans notre contexte chahuté de perte de repères, l’existence de lieux et d’organes de débat, de documentation et de réflexion structurés est essentielle. Force est, malheureusement, de constater la disparition en Suisse romande de deux médias qui leur était justement dévolus: Domaine public et choisir.
Successivement député socialiste du canton de Genève, conseiller national genevois, président du PS genevois et maire d’Onex, René Longet est aussi un pionnier de l’écologie et un défenseur des droits des peuples autochtones. Auteur de nombreux ouvrages et articles, il écrit pour choisir depuis 1975.
De 1959 à 1963, choisir, alors jeune revue jésuite de Suisse romande, outre ses thèmes éthiques, œcuméniques, culturels, s’ouvrait à la question de la femme dans la société. Défi lancé, avec une rubrique La Femme à la page inaugurée dès le premier numéro par Marthe Macaux. Sous l’adresse «Mes amies», celle-ci invitait les femmes à dialoguer dans ces pages. Souhaitant créer un «carrefour où nous pourrions mettre en commun nos pensées, nos problèmes et, pourquoi pas, nos revendications»,[1] la chroniqueuse y va prudemment. Nous sommes en 1959, et si l’après-guerre reconnaît la force de travail et d’initiative des femmes, vu leur engagement pour suppléer aux hommes envoyés au front ou aux frontières, le mouvement d’émancipation des femmes porté par quelques pionnières historiques ne s’est pas encore étendu à la société entière.
Le 19 mai 2022, lors de sa rencontre au Vatican avec les responsables des revues culturelles européennes de la Compagnie de Jésus (dont choisir), le pape François a précisé quelle est, à ses yeux, la mission de celles-ci. Extrait choisi de cet entretien mené sous forme de questions-réponses, diffusé conjointement par toutes les revues culturelles jésuites européennes.[1]
Informaticienne, la trentaine, Erin Lederrey préside l’Antenne LGBTI de Genève. Avant cela, elle étudiait la théologie à l’Université de Genève. Son souhait? Travailler, un jour, au sein de l'Église. Pour le moment, elle se distingue comme première femme trans aumônière de l'armée suisse. La journaliste Marie Destraz l'a rencontrée. Son article fait écho à deux entretiens à paraître dans notre numéro d'été Douter et changer sans se perdre: Dans la peau d’une femme, entretien avec Mathilde, transgenre par Lucienne Bittar; L’intimité de l’identité de genre, entretien avec Marius Diserens par Céline Fossati.
Spécialiste de la littérature française du XVIIIe siècle, c’est à l’école de Rousseau que Claude Habib s’est mise à revoir sa pensée féministe universaliste, inspirée par Simone de Beauvoir, et à reconnaître la valeur de la division sexuée. Dans son dernier livre sur «la question trans», elle montre comment l’expansion des demandes de transition d’identité suscite de nouvelles interrogations et divisions au cœur du féminisme.
Claude Habib est professeure de littérature et linguistique françaises à l’Université de Paris III. Elle est membre du comité de rédaction de la revue Esprit et du comité de la collection Littérature et Politique aux éditions Belin. Elle a écrit plusieurs ouvrages autour des relations amoureuses et un livre récent sur La question trans (Gallimard, 2021). Nathalie Sarthou-Lajus, est philosophe, rédactrice en chef adjointe de la revue Études.
À 26 ans, Marius Diserens se définit comme queer. Mais ne lui demandez pas de se dévoiler davantage. Homme, femme, non binaire... «Les identités de genre permettent à une personne de se définir pour elle-même.» Il, elle ou iel n’a pas l’obligation d’afficher la couleur en public. Son identité de genre fait partie de son intimité. Et certaines identités semblent plus floues que d’autres. Celle de no gender ou de non binaire notamment. Entretien.
Spécialiste en inclusion et diversité, plus particulièrement des questions sur la masculinité et les communautés LGBTQIA+, Marius Diserens a suivi son master en études genre à l’Université de Genève. Il est élu vert au Conseil Communal de Nyon, activiste, professeur de yoga et coordinateur général du festival Les Créatives.
Depuis le 1er janvier 2022, les personnes transgenres et intersexes domiciliées en Suisse peuvent plus facilement changer de sexe à l’État civil. Elles n’ont notamment plus besoin de se soumettre à des examens médicaux préalables.[1] La simplification des procédures administratives vise à alléger un parcours identitaire souvent jalonné de tourments. Mathilde,[2] 55 ans, a entrepris tardivement sa «mutation», officialisée en 2016 par une nouvelle carte d’identité libératrice. Un parcours qu’elle a accepté de relater.
Les invisibles, les transparents… Deux termes que j’hésite à utiliser pour désigner les 735'000 personnes qui vivent en Suisse au-dessous du seuil de pauvreté (9% de la population) et les quelque 600'000 autres qui se situent juste au-dessus.[1] Les «pauvres» ne sont pas invisibles, ni transparents. Ils et elles sont de chair et d’os comme tout le monde, ils et elles prennent le bus, font leurs courses, amènent leurs enfants à l’école. D’ailleurs, ces enfants sont aussi pauvres et ils sont visibles.
Par une belle journée de juin 2020, Tamara Pellegrini rejoint quelques amis pour une sortie en bateau sur le Rhône. De retour sur le quai, elle est prise d’un violent «mal de mer». Tout tangue autour d’elle et elle a des nausées. Dès lors, rien ne sera plus comme avant pour elle. Atteinte d’une maladie dite invisible, la jeune femme s’est depuis engagée à faire connaître cette notion et les difficultés qui lui sont inhérentes, en donnant la parole à d’autres malades.
Tamara Pellegrini est l’auteure d’une série de podcast intitulés Les invisibles où elle recueille les témoignages de personnes vivant avec une maladie invisible et déconstruit certains préjugés. Les épisodes sont disponibles sur toutes les plateformes d’écoute: Spotify, Apple Podcast, Podcast Addict, Youtube, etc.
Somaya[1] et moi avons travaillé ensemble pendant quelques mois dans sa ville d’origine, Jalalabad, où j’étais interprète et elle bénévole. Elle m’avait offert une longue robe verte qu’elle avait fait faire chez un tailleur de son quartier. Elle était si longue que je me prenais les pieds à chaque pas dans les pans de tissu. Après mon départ, nous avons gardé contact de loin en loin, puis depuis l’été 2021 très régulièrement. Somaya cherche à fuir par tous les moyens.
Mathilde Weibel a été interprète pashto/dari/français à Lesbos pour une ONG médicale, puis à Kaboul pour le CICR. Elle est l’auteure de L’espoir piégé: avec les réfugiés de Lesbos (Harmattan 2021), et de Place des Fêtes. Journal d’un exil parisien (Bord de l’eau 2018).
Un journaliste de la RTS l’a nommée «la Joël Dicker des guérisseurs» tant ses guides ont du succès et «sont nimbés de mystère». Une jolie formule pour dire que l’ethnologue Magali Jenny est lue par un large public et que son Nouveau guide des guérisseurs de Suisse romande n’aura pas un succès moindre que le précédent auprès d’une large frange de la population.
Ethnologue spécialisée en ethnomédecine -avec un mémoire de licence dédié aux guérisseurs fribourgeois-, anthropologie des religions, et collaboratrice scientifique au Tibet Museum à Gruyères, Magali Jenny est l’auteure du Guide des guérisseurs de Suisse romande (Favre), dont la dernière version vient de paraître avec un répertoire actualisé de près de 250 adresses (Lausanne, Favre 2021).
La justice restaurative prend de l’ampleur en Suisse, même si notre pays reste encore à la traîne par rapport à d’autres pays en Europe. Ces rencontres entre victimes et auteurs de délits reposent sur la circulation d’une parole réparatrice, corsetée par la justice pénale traditionnelle. Décryptage avec Claudia Christen, présidente du Swiss RJ Forum, un organisme mandaté pour mener à bien ces rencontres.