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lundi, 28 novembre 2016 14:21

Résistance

C'est à Bangui que le pape François lançait en novembre 2015 le Jubilé de la miséricorde, ouvrant la porte sainte de la cathédrale. Malgré la situation dangereuse de ce pays déchiré par la violence, il n’avait pas hésité à s’y rendre, mettant en pratique une théologie de la résistance qu’il appelle régulièrement de ses voeux. Une piste précieuse pour ce continent, comme en témoignait à l'époque le jésuite Michel Segatagara (voir l'article ci-dessous), et comme le redit aujourd'hui le Père Bernard Kinvi, religieux camillien d’origine togolaise, qui dirige l’hôpital de la mission catholique de Bossemptelé (podcaste de Radio Vatican du 11 avril 2017, à écouter ici.  

En faisant de Bangui « la capitale spirituelle du monde » et en offrant à chaque diocèse de Centrafrique un ostensoir pour l’adoration perpétuelle au cœur de cette Afrique « poumon spirituel de l’humanité » (Benoît XVI), l’apôtre François a invité les Africains à résister avec les armes de la prière et du travail artisanal de la paix. S’adressant aux jeunes, il a comparé la résistance au bananier : « Le bananier est un symbole de vie : il croît sans cesse, se reproduit, donne des fruits tellement énergétiques, il résiste. Il est le symbole de la voie qui nous est proposée en ce moment difficile de haine, de guerre et de division : la résistance. (...) Il faut résister, avoir le courage de la lutte pour le bien. »
Le pape s’est ainsi fait l’écho de Paul dans sa lettre aux Romains : « Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais sois vainqueur du mal par le bien » (Rm 12,21) ! C’est au fond tout le chapitre 12 de l’épître de Paul aux Romains qu’il faudrait reprendre ici pour articuler une théologie (africaine) de la résistance. A mon humble avis de Jua kali ou apprenti théologien africain, cette approche d’une théologie africaine de la résistance, esquissée par le pape François, serait un complément opportun aux différents courants de théologie africaine déjà existant (inculturation, libération, reconstruction, espérance et solidarité...). Car ceux-ci restent encore souvent confinés aux cercles universitaires et ne semblent pas avoir un véritable impact sur la vie des chrétiens « ordinaires » du continent.
Une théologie africaine de la résistance aurait donc le mérite d’être « pratique », donnant toute sa place à la prière et à l’action. Ce sont en tout cas les deux dimensions que le pape François a souligné devant les jeunes de Bangui : « Avant tout, la prière. La prière est puissante ! La prière vainc le mal ! La prière vous rapproche de Dieu qui est le Tout-puissant. Je vous pose une question : est-ce que vous priez ? (...) Il est nécessaire de prier pour résister, pour aimer, pour ne pas haïr, pour être des artisans de paix » ; et « la paix n’est pas un document qu’on signe et qui reste là. (...) La paix est un travail artisanal, elle se fait avec les mains, elle se fait avec sa vie. »
Oui, une théologie de la résistance pour ceux qui refusent de rester des victimes, qui veulent être vainqueurs du mal par le bien : « Voulez-vous être vaincus ou vainqueurs dans la vie ? » Une théologie du courage au fond : « courageux en pardon, courageux en amour, courageux pour faire la paix ».
M. S. K.

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