Le pape François nous « booste ». Et particulièrement nous les prêtres. Lors de la messe chrismale, quinze jours après son élection, il avait demandé aux prêtres d’être de bons pasteurs au milieu de leur troupeau, « pénétrés de l’odeur de leurs brebis ». L’image est parlante : comment un berger pourrait-il porter sur lui l’odeur de ses brebis s’il reste dans son bureau, loin d’elles ? Ou s’il se limite à des considérations tellement éloignées de la vie des gens ?
Dans cette même homélie, le pape ajoutait que le rôle du prêtre est de répandre l’onction qui vient de Dieu. Au prêtre de veiller à ce qu’elle soit une huile de joie, une huile parfumée qui sent bon la miséricorde, une bonne huile qui fait du bien. C’est en donnant cette bonne huile que l’on voit comment le Seigneur agit à travers nous. A l’inverse, ajoutait-il, « le prêtre qui sort peu de lui-même, qui oint avec parcimonie - je ne dis pas “jamais” car, grâce à Dieu, les fidèles nous “volent” l’onction - perd le meilleur de notre peuple, ce qui est capable d’allumer le plus profond de son cœur de prêtre. Celui qui ne sort pas de lui-même, au lieu d’être un médiateur, se convertit peu à peu en intermédiaire, en gestionnaire. »
Des images contrètes
Ce que j’aime chez François, ce sont les images et les exemples concrets qu’il emploie et qui expriment tellement bien sa pensée. Aux séminaristes de Rome, il a dit qu’il vaut mieux finir la journée bien fatigué, d’une bonne fatigue de tout ce qui a été vécu, plutôt que de prendre un cachet pour dormir.[2] Je n’ai jamais pris de cachet pour dormir, mais je repense à lui quand je rentre à la cure avec une « bonne fatigue ». Le pape François nous stimule par son propre exemple. Il n’a pas voulu habiter dans les appartements pontificaux, mais à la maison d’accueil du Vatican, au milieu des hôtes de passage. Il porte sa soutane blanche comme un habit de travail, sans fioritures. Il souhaite une Eglise pauvre pour les pauvres. Il fait le choix de la simplicité et nous invite à faire de même. Désormais, un prélat qui a des goûts de luxe, cela ne passe plus… et c’est bien ainsi !
Il nous stimule aussi dans notre pastorale, en nous invitant à avoir toujours un accueil bienveillant. Il met en garde contre ceux qui veulent instituer un huitième sacrement : celui de la « douane pastorale »[4] ! Sur le terrain, nous sommes en effet confrontés parfois à des situations qui ne correspondent pas aux normes que nous avons établies. Comme ce quadragénaire qui veut que je célèbre son mariage dans trois semaines ! Vais-je le remballer, en lui expliquant qu’il s’y prend trop tard ? Je choisis plutôt de le rencontrer avec sa fiancée. Et voilà qu’au fil de la discussion, il exprime son souhait de recevoir la confirmation ; il va donc cheminer, après son mariage, pendant une bonne année de catéchuménat.
Je me réjouis de voir que le pape François empoigne les problèmes de notre temps, pas seulement ceux de la réforme de la curie et des institutions financières du Vatican, mais aussi les problématiques autour de la pastorale familiale, qui seront l’objet des deux prochains Synodes des évêques, avec, entre autres, la question de l’accueil des divorcés-remariés.[4] Il faudra certainement, un jour ou l’autre, réfléchir en profondeur sur les ministères dans l’Eglise.
Authenticité
Enfin, je suis très heureux du rayonnement du pape, bien au-delà des catholiques ou des chrétiens. François donne une image positive, parce qu’il est authentique. L’autre jour, quelqu’un me disait : « Je ne suis pas catholique mais j’aime bien votre pape. » Moi aussi, je l’aime bien notre pape !
[1] • Le Père Desthieux est l’auteur de La messe… Enfin je comprends tout !, St- Maurice, Saint-Augustin 2005, 336 p. Il vient de terminer sa thèse à l’Université de Fribourg, sur Le silence dans la liturgie de la messe. (n.d.l.r.)
[2] • Discours aux recteurs et aux élèves des collèges et couvents pontificaux de Rome, 12 mai 2014.
[3] • Homélie du 25 mai 2013 à la Maison Sainte-Marthe.
[4] • Voir à ce sujet François-Xavier Amherdt, « Divorcés remariés. Pour une économie de la miséricorde », in choisir n° 657, septembre 2014, pp. 13-17. (n.d.l.r.)