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mardi, 03 septembre 2013 09:34

E viva François !

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Ce pape-là, je l’aime ! Il me remplit d’espoir pour l’Eglise, et même pour le monde. Un pape qui appelle les dirigeants des nations à se faire serviteurs et à ne pas user de leur position pour leurs ambitions personnelles ou pour satisfaire leur goût du pouvoir : merveilleuse utopie ! Cette appréciation personnelle ne se fonde que sur des comptes rendus de médias, des images retransmises et des dires de personnes qui l’ont rencontré. Certes, il faut attendre pour voir, comme le rappellent avec sagesse nombre de connaisseurs du Vatican. Mais ce pape-là me donne envie d’y croire avant de voir ! De lâcher les rênes en confiance, de me retrouver parmi le Peuple de Dieu guidé par son évêque.

Cela ne tient pas uniquement au fait que François soit un jésuite, bien que cela y soit évidemment pour quelque chose. Sa manière d’aborder les questions en recherchant la volonté de Dieu reflète les Exercices. Sa façon de penser, sa théologie sont clairement influencées par saint Ignace et les lignes de la Compagnie de Jésus,[1] pour qui le service de la foi est inséparable de l’engagement auprès des pauvres et pour la promotion de la justice. Ainsi François montre depuis le début de son pontificat un vrai intérêt pour les « petits », comme l’illustre sa visite aux migrants africains sur l’île italienne de Lampedusa, le 8 juillet dernier. Mais il y a aussi, dans mon espérance, la propre personnalité du pape, un mélange de liberté assumée, de courage (il en faut pour assumer cette charge, surtout lorsqu’en tant que jésuite on n’est pas censé rechercher des postes élevés dans l’Eglise) et d’intelligence active, assortis à une grande capacité d’écoute, une large culture et un petit côté révolutionnaire très sympathique qui fait que la langue de bois n’est pas son fort et que les jeunes peuvent se rattacher à ses discours. Difficile de ne pas s’y retrouver en tant que rédactrice de choisir...

Lorsqu’il rencontre les gens, François les regarde, il les touche et les embrasse. Il ne joue pas. Il entre réellement en relation avec autrui. Il dialogue : il écoute et il parle donc. On a assez chanté les louanges de Jean Paul II et, inversement, critiqué Benoît XVI sur ce plan pour apprécier cette qualité de François ! Il y allie l’humilité de Benoît XVI (mais sans sa timidité ni son côté cérébral) et la chaleur latino.

Que François soit Argentin est une autre richesse pour le monde : il conjugue l’expérience historique difficile de la colonisation et d’une économie longtemps fragile, et l’influence de la culture occidentale. Son mode de penser et d’être peut, dès lors, toucher nombre d’habitants de la planète. Mais c’est surtout une sacrée opportunité pour l’Amérique latine... et pour l’Eglise de se rattraper des erreurs qu’elle a commises sur ce continent. Jean Paul II avait soufflé un vent froid sur l’évangélisation en Amérique latine (contrairement à ce que les grandes foules rassemblées lors de ses voyages pouvaient laisser croire) en condamnant la théologie de la libération et en brimant les petites communautés de base si adaptées à la culture et à la réalité du continent. Benoit XVI, pour sa part, a constaté à plusieurs reprises l’éloignement des catholiques d’Amérique latine, invoquant, de manière insuffisamment nuancée, la sécularisation.[2] La réalité, c’est que les évangéliques, plus à même de s’adapter à l’évolution de la société, se sont engouffrés dans la brèche (de 10 millions en Amérique latine en 1960, ils sont passés à environ 100 millions au XXIe siècle), amenant avec eux la « théologie de la prospérité ».[3] François, lui, est issu de cette culture. Il a baigné et grandi dans sa religiosité populaire, mais aussi étudié dans ses universités : il connaît l’espérance des pauvres et l’anticléricalisme de certains dirigeants. Il saura parler au cœur et à la raison des Latino-Américains. Leonardo Boff, théologien brésilien de la libération condamné au silence par Jean Paul II, ne tarit-il pas d’éloge sur lui ?

Comme le dit Joëlle Carron, en matière de foi, « c’est souvent notre crédibilité personnelle qui est appelée à faire la différence dans une overdose de propositions et de repères spirituels »[4]. Le guide spirituel François saura-t-il donner un exemple évangélique ?

 

1 Voir l’article de José María Poirier, aux pp. 19-23 de ce numéro.

2 Voir l’article de Véronique Lecaros aux pp. 14-18 de ce numéro.

3 Cf. Véronique Lecaros, « Au défi des évangéliques », in choisir n° 613, janvier 2011, pp. 13-17, accessible sur www.choisir.ch.

4 Voir les pp. 9-11 de ce numéro.

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