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lundi, 19 juillet 2021 11:06

Un outil d’évangélisation

Equipe de basket féminine en Ile-de-France, 2014 © Philippe Lissac/GodongTandis que Tokyo se prépare à vivre des Jeux olympiques "tristes", marqués par la pandémie, posons un regard positif sur le sport à la suite des derniers papes qui y voient un moyen de renforcer l'épanouissement personnel et la paix entre les peuples. Issue du désir exprès du pape Jean-Paul II, passionné de sport, la section Église et Sport du Saint-Siège s’efforce depuis 2004 de promouvoir une culture positive de rencontre et de développement humain, ancrée dans les valeurs chrétiennes. Elle porte une attention particulière aux jeunes et à leurs entraîneurs.

La section Église et Sport fait partie du Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie. L’espagnol Santiago Pérez de Camino, 32 ans, en est responsable depuis 2013. Pendant 10 ans, il a collaboré avec la Commission pour la pastorale des jeunes du diocèse de Madrid et a été impliqué dans la formation des entraîneurs sportifs.

Notre travail comporte deux domaines principaux. D’une part, nous représentons le Saint-Siège auprès de diverses institutions internationales, telles que les Nations Unies, le Comité international olympique (CIO) et le Conseil de l’Europe. Au travers des interventions des nonces apostoliques (ambassadeurs) et de représentants du Vatican, nous avons la possibilité de contribuer à l’élaboration de lois et de directives susceptibles de promouvoir les vertus chrétiennes et les valeurs humaines au sein de la société. D’autre part, nous encourageons et lançons des initiatives dans le monde entier visant à évangéliser les nouvelles générations et à leur inculquer ces vertus et valeurs.

L’un des programmes que la Section a organisés est le Marathon de Terre Sainte, qui est une course de Bethléem à Jérusalem. Pendant de nombreuses années, à l’occasion de cette manifestation, diverses activités et rencontres interreligieuses ont eu lieu en vue de promouvoir la paix entre Israéliens et Palestiniens.

Un autre évènement marquant de notre activité a été, en collaboration avec le Conseil pontifical pour la culture, l’organisation en 2016 de la première Conférence mondiale sur la foi et le sport, plus particulièrement sur la portée et les limites de leurs liens. Intitulée Le sport au service de l’humanité, elle visait à élaborer des programmes permettant à toutes les personnes intéressées par le sport d’apprendre à vivre dans le respect envers tous, par une compréhension croissante des traditions et des valeurs des autres, de parvenir à mener une vie plus pleine et plus saine, et de former des communautés mieux intégrées.

Sur les traces des papes

Le pape François a souligné le fait que les sports doivent être au service de l’humanité, et non l’inverse. S’adressant aux participants à la Conférence mondiale, il a déclaré: «Quand nous voyons les athlètes tendre au maximum de leurs capacités, le sport nous enthousiasme, nous émerveille, nous rend presque fiers. Il y a une grande beauté dans l’harmonie de certains mouvements, tout comme dans la force ou le jeu d’équipe. Quand il est ainsi, le sport transcende le seul niveau physique et nous porte dans l’arène de l’esprit, et même du mystère. Et ces moments sont accompagnés de grandes joies et de satisfaction que nous pouvons tous partager, même si nous n’avons pas participé à la compétition. […] En ce qui concerne l’Église catholique, elle est engagée dans le monde du sport pour porter la joie de l’Évangile, l’amour inclusif et inconditionnel de Dieu pour chaque homme.» Le pape François n’est pas le premier pontife à mettre l’accent sur le rôle de la foi dans le sport. On pourrait citer près de 600 messages, allocutions et discours de l’Église à ce sujet depuis 1903.

Sur les traces des papes, notre bureau promeut ces lignes directrices de l’Église sur le sport, compris comme étant au service du développement de la personne et de sa rencontre avec Dieu. Nous coopérons avec certaines fondations sportives bien connues, actives en faveur du développement des populations du Sud, afin de promouvoir la dignité humaine au travers d'activités physiques, auxquelles chacun doit pouvoir participer indépendamment de sa race, son genre, son statut économique, sa religion ou son idéologie. Ainsi, par exemple, la Coupe du monde de football des sans-abri soutient le développement humain intégral des plus défavorisés. Lors de l’audience donnée aux participants à la Conférence en 2016, le pape a mis en lumière «l’enthousiasme des enfants qui jouent avec un vieux ballon dégonflé» dans les zones périphériques de la société. Il a encouragé les communautés religieuses et toutes les organisations sportives à faire en sorte que les jeunes vivant dans la pauvreté puissent pratiquer le sport dans un environnement digne.

Éducation et évangélisation

Alors que nous observons le rôle central que jouent, dans la plupart des sports, l’argent, la politique, le pouvoir et la volonté de gagner à tout prix, l’Église considère le développement de l’être humain comme l’objectif essentiel de ces activités. Notre Section a pour but de proposer un point de référence pour l’éthique et les valeurs chrétiennes dans le monde du sport, afin d’aider les athlètes confrontés aux défis de la consommation et de l’égoïsme à façonner leur style de vie et à le fortifier dans ce sens.

Pour atteindre cet objectif, Église et Sport a organisé quatre séminaires internationaux sur différents thèmes, dont le Dicastère a publié les actes. Le premier d’entre eux (2005), intitulé Le monde du sport aujourd’hui, était centré sur la relation entre les sports et l’évangélisation dans le monde contemporain et s’inspirait d’une question posée par Pie XII: «Comment l’Église pourrait-elle ne pas s’intéresser au monde du sport?» Le séminaire a mené une étude anthropologique approfondie sur tous les aspects de la personne humaine, et les intervenants se sont demandé comment l’Église, que le bienheureux Paul VI avait définie comme «experte en humanité», pouvait entrer en dialogue avec les athlètes au travers des bienfaits et de la joie que procurent les activités physiques.

Le séminaire suivant, en 2007, Le sport, un défi éducatif et pastoral, s’est penché sur le rôle des aumôniers sportifs. Ce sont eux qui manifestent la présence de l’Église dans les diverses disciplines sportives, en témoignant de la signification importante du sport dans le contexte général de la vocation chrétienne à la sainteté. Les participants ont noté que l’aumônier, tout en assumant son rôle, a besoin de la coopération des athlètes, des entraîneurs, des associations et de l’ensemble de la communauté afin de répondre aux questions qui surgissent dans le monde du sport, vaste champ ouvert à l’action apostolique. C’est ainsi qu’au cours du séminaire de 2009, intitulé Sport, éducation, foi: pour une nouvelle saison du mouvement sportif catholique, nous avons cherché à définir plus clairement l’identité de ce mouvement et la contribution qu’il peut apporter à l’évangélisation. Les institutions, les clubs et les associations sportives peuvent accomplir un travail remarquable d’enseignement et de formation des athlètes dans le domaine des valeurs chrétiennes. Reste que si les instructeurs et les conseillers n’offrent pas une présence attentive aux sportifs, il leur sera très difficile de connaître leurs besoins, de les former et de les encourager.

L’importance des entraîneurs

C’est pour relever ce défi que la Section a organisé en 2015 le séminaire Entraîneurs: éducateurs de personnes, sur le rôle des entraîneurs dans la formation des nouvelles générations de sportifs et le renouveau du monde du sport. En effet, si toutes les équipes n’ont pas un aumônier, elles ont certainement toutes un entraîneur. De nombreux enfants consacrent plus de temps au sport qu’à leur famille, au catéchisme ou à d’autres activités paroissiales. L’entraîneur peut donc devenir un point de référence fixe, un conseiller et une source d’inspiration.

En raison du contexte social actuel de la famille, du travail et des loisirs, l’entraîneur occupe auprès des jeunes générations un rôle décisif et parfois même unique[1]. Nous entendons beaucoup parler aujourd’hui de la perte de l’unité familiale et des jeunes abandonnés à eux-mêmes. De ce fait, les enseignants et les entraîneurs doivent assumer un rôle « supplémentaire » très important pour la formation humaine des jeunes. On peut en dire autant des prêtres, des catéchistes et des aumôniers de jeunesse. Toutes ces catégories de responsables peuvent combler un vide dans le domaine de l’éducation et contribuer à réorienter la vie de nombreux jeunes.

Notre Section, enfin, vient de publier un document destiné à promouvoir un sport humain et juste, tant aux niveaux professionnel qu’amateur, ainsi qu’à présenter des lignes directrices pour l’évangélisation de la nouvelle génération au travers du sport.[2] Ce document s’adresse aux catholiques, aux autres communautés chrétiennes, aux associations sportives d’inspiration chrétienne et à toutes les personnes qui s’intéressent à l’éthique du sport.

Une impulsion

Toutes ces initiatives permettent à l’Église de contribuer à l’humanisation du sport au niveau universel, mais nous devons bien reconnaître que le Saint-Siège n’est pas présent sur le terrain. Celui-ci relève de la mission des Églises locales : des conférences épiscopales nationales, des diocèses et des paroisses. Il incombe à ceux-ci d’élaborer les méthodes pastorales qui conviennent le mieux à leur culture. Ainsi, par exemple, la pastorale du sport en Amérique du Nord n’est pas la même qu’en Asie du Sud ou en Afrique. Notre Section souhaite simplement leur apporter une perspective chrétienne qui les aide à mettre sur pied leur programme de pastorale sportive. Nous cherchons aussi à faire connaître cette parole du Saint Père: «Le sport est une activité humaine de grande valeur, susceptible d’enrichir la vie.»

(traduction Claire Chimelli)

[1] Voir Lucienne Bittar, Bien plus que du foot, Bien plus que du foot (n.d.l.r.)
[2] Discastère pour les laïcs, la famille et la vie, Donner le meilleur de soi. Sur la perspective chrétienne du sport et de la personne humaine, Rome, 1er juin 2018. 

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