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vendredi, 09 octobre 2020 10:20

Une question de vie ou de mort

Photo: Coalition mondiale contre la peine de mortPour les personnes qui risquent la peine de mort, une bonne avocate ou un bon avocat peut sauver des vies. Cette année, la campagne de la Journée mondiale contre la peine de mort (10 octobre 2020) est donc consacrée au droit à une défense efficace à tous les stades du procès, et même après. L'ACAT-Suisse se joint à la campagne et adresse un appel urgent à Alexandre Loukachenko, président du Bélarus.

Le 10 octobre 2020, la Coalition mondiale contre la peine de mort, en collaboration avec l'ACAT-Suisse et d'autres organisations, célèbre la Journée mondiale contre la peine de mort. Le mouvement international contre la peine de mort vise à abolir complètement et le plus rapidement possible ce châtiment dans le monde entier et pour tous les crimes. Depuis la fin des années 70, il a remporté des victoires déterminantes: aujourd'hui, 142 pays, soit plus des deux tiers, ont aboli la peine de mort en droit ou en pratique. Néanmoins, selon Amnesty International, au moins 26'604 personnes dans le monde étaient sous le coup d'une condamnation à mort à la fin de 2019.

Au vu de ces chiffres, et en attendant l'abolition définitive de la peine de mort, l'ACAT-Suisse attire l'attention de la société civile et de la communauté internationale sur l'importance d'une représentation juridique efficace, à tous les stades de la procédure pénale, afin d'éviter au maximum cette terrible sentence.

Un droit fondamental souvent bafoué

Le droit à une défense compétente s'applique aussi bien pendant l'arrestation, la détention et le procès qu'après. La plupart des pays prévoient ce droit fondamental dans leur législation nationale. Tous les grands traités internationaux et régionaux le garantissent également. Dans la pratique, cependant, ce droit est souvent bafoué. Les pays qui maintiennent la peine de mort en fournissent de nombreux exemples. Les avocats de la défense n'ont souvent pas assez de temps pour s’entretenir avec leur client ou préparer leur dossier avant le procès. Beaucoup d’avocats commis d’office par l’État sont surchargés de travail. Certains juristes travaillent dans des environnements tellement hostiles qu’ils risquent leur propre vie. D’autres n’ont pas les expériences requises pour représenter avec succès un client qui encourt la peine capitale, ne sont pas suffisamment rémunérés pour leur travail ou manquent de fonds pour les dépenses de base. Ainsi, les avocats doivent parfois utiliser leurs fonds propres pour visiter les clients incarcérés (comme en Tanzanie) ou payer certaines procédures comme le recouvrement de dossier (Kenya).

Si la représentation de la défense n’est pas effective, le droit à un avocat se vide de toute substance, insiste la Campagne. Dans ce cas, il ne peut plus être question d’un procès équitable. Une étude conduite aux États-Unis a révélé que les personnes détenues dans les couloirs de la mort au Texas avaient une chance sur trois d’être exécutées sans que leur dossier soit examiné par un avocat qualifié ou sans que les éléments jugés critiques dans leur défense soient présentés au tribunal.

Appel à Loukachenko

Dans le cadre de la campagne pour la Journée mondiale contre la peine de mort, l'ACAT-Suisse appelle chacun à adresser un appel urgent à Alexandre Loukachenko pour lui demander un moratoire immédiat sur la peine de mort au Bélarus et la fin du secret entourant la date d'exécution et le lieu d'inhumation. Le Bélarus est en effet le seul pays d'Europe qui n'a pas encore aboli la peine de mort. L'ACAT demande également la commutation de la peine de mort pour deux jeunes hommes biélorusses qui sont sur le point d'être exécutés. (réd./communiqué)

Plus d'information sur le site de l'ACAT-Suisse


Appel particulier pour l'abolition de la peine de mort en l'Afrique malgré la montée de la violence extrémiste sur le continent

À l’occasion de cette campagne, le Groupe d’Intervention Judiciaire SOS-Torture en Afrique appelle les Chefs d’État et de gouvernement africains à soutenir l’adoption de la résolution relative à un moratoire universel sur l’exécution de la peine de mort et l’abrogation de la peine de mort, qui sera votée par l’Assemblée Générale de l’ONU en décembre 2020.

Au cours des dernières années, l’Afrique s’est clairement positionnée comme un continent abolitionniste puisque plus de 80% des pays y ont aboli la peine de mort en droit ou en pratique. Pour rappel, en 2018, 20 États africains ont voté pour l’adoption d’un moratoire sur les exécutions des condamnations à mort. Et le 30 avril 2020, le Tchad a confirmé cette tendance abolitionniste en dépit des nombreux défis sécuritaires qui avaient conduit à sa réintroduction en 2017.

En effet, au cours des dernières années, les défis sécuritaires liés au terrorisme qui traverse l’Afrique, ont figé cette dynamique et crispé les efforts des parlements et des autorités judiciaires. De nombreux pays dans le bassin du lac Tchad ou dans la bande sahélienne ont reconsidéré les peines capitales comme un instrument de lutte contre l’extrémisme violent. Mais la peine de mort n’a aucun effet dissuasif et n’a pas permis de résoudre ces crises sécuritaires ni de freiner leur amplitude.

Dans ces pays, «l'administration judiciaire, la police et l'administration pénitentiaire sont généralement considérées comme inefficaces, laxistes et responsables de l'impunité». De même la prolifération de lois anti-terroristes et des pratiques sécuritaires disproportionnées ont accru la pratique de détentions arbitraires, des stigmatisations communautaires, et des intimidations multiformes contre les défenseurs de droits de l’homme. Dans un tel environnement tendu, où de nombreuses personnes sont accusées à tort ou à raison de participation à des actes terroristes, l’absence d’un avocat constitue déjà en soi un risque élevé de condamnation à mort. Le déni de l’accès à un avocat garantit l’absence d’un procès équitable et un risque élevé d’erreurs et de confusions judiciaires, et de condamnations injustes. La peine de mort est donc cruelle et inhumaine et contraire à la Convention contre la torture.

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