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mercredi, 27 mars 2013 14:27

Les défis de la théologie

Askani 43992Hans-Christoph Askani, Carlos Mendoza, Denis Müller, Dimitri Andronicos (sous la dir.), Où est la vérité ? La théologie aux défis de la « Radical Orthodoxy » et de la déconstruction, Genève, Labor et Fides 2012, 358 p.

Cet ouvrage rassemble les contributions de quinze théologiens et philosophes qui se prononcent sur deux dynamiques du débat théologique actuel : la Radical Orthodoxy, dont l’anglican John Milbank est l’un des principaux représentants, et la déconstruction.

La Radical Orthodoxy se caractérise essentiellement par le fait de prendre au sérieux les premiers commandements du Décalogue (« Je suis le Seigneur ton Dieu. Tu n’auras pas d’autre dieu devant moi… »), jusque dans leurs dernières conséquences. Ce mouvement allie un conservatisme doctrinal à un progressisme social. Ses disciples combattent le rationalisme moderne et en contestent la prétendue toute-puissance en matière religieuse.

La deuxième dynamique est celle de la déconstruction, issue du philosophe Jacques Derrida, selon laquelle la signification d’un texte donné (essai, roman, etc.) est le résultat de la différence entre les mots employés, plutôt que de la référence aux choses qu’ils représentent. Certains théologiens contemporains cherchent à appliquer la déconstruction pour critiquer radicalement les traditions chrétiennes.

L’ouvrage pose la question de la vérité en régime théologique et de la légitimité de poser cette question dans les termes des deux courants de pensée précités. Il demande comment mieux articuler théologie et philosophie, sans rien céder des exigences de la première, tout en participant de manière compréhensible et percutante aux débats intellectuels et culturels actuels. Certains auteurs tentent même de suggérer une troisième voie.

La contribution de Denis Müller propose une excellente synthèse des positions des différents exposés : « Une orthodoxie pas assez subversive, pour une radicalité pas assez moderne. » Le théologien protestant insiste sur la nécessité d’une refondation de la théologie avec une visée universelle et anti relativiste, mais il reconnaît la difficulté d’une telle démarche qui doit à la fois éviter l’écueil du relativisme pur et simple et celui de l’orthodoxie radicale. Il conclut en énonçant des vertus théoriques et pratiques pour la future tâche de la théologie : l’imagination « pour faire craquer le conformisme académique et pieux », l’étonnement « qui seul permet de découvrir du neuf », le courage pour « ne pas céder à la pensée correcte d’une politique universitaire utilitariste », la lucidité pour « éviter la confusion intellectuelle et l’adaptation non critique aux modes ambiantes », l’écoute pour ne pas se laisser séduire par le « discours de la bien-pensance, du tout médiatique et de la bonne-gouvernance », la pensée afin de « ne pas rallier trop vite les catéchismes ou suivre les troupes », la liberté enfin, « source authentique d’une radicalité de service et non de domination ».

 

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