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mercredi, 27 mars 2013 14:02

Newman raconté par Jean Honoré

Honore 44329Jean Honoré, Newman, tel qu’en lui-même, Paris, Cerf 2012, 208 p.

Mgr Jean Honoré, cardinal depuis 2001, est décédé le 28 février dernier à l’âge de 92 ans. Il avait étudié inlassablement l’œuvre de Newman, lui aussi cardinal, et cela, à travers ses lettres innombrables, ses poèmes, ses homélies et ses romans. Le titre qu’il a donné à son dernier livre ne pourrait être plus parlant...[1].

Newman fut un témoin de son temps et le cardinal Honoré le décrit ici à travers sa correspondance. Newman est l’aîné de six enfants. Son père, banquier, fait de mauvaises affaires, perd sa situation et meurt peu après, lui confiant la fratrie. La mort brutale de sa petite sœur chérie lui causera un immense chagrin.

A 15 ans, Newman vit une rencontre intérieure avec Dieu qui orientera toute sa vie. Il devient prêtre après des études brillantes à Oxford, participe au fameux mouvement d’Oxford et, à l’âge de 44 ans, se convertit au catholicisme. Il passe de longs mois à Rome. A son retour, ses amis et sa parenté le reçoivent froidement, se sentant peut-être trahis. Il fonde l’Oratoire de saint Philippe de Néri et devient ensuite recteur de l’Université catholique de Dublin.

Newman jouit d’une grande richesse de tempérament qui concilie l’aptitude du moi à se rencontrer au-dedans, avec celle de se projeter dans le rapport à autrui et dans l’action. Tout montre en lui un équilibre humain des facultés, équilibre qui lui confère une certaine supériorité, malgré une forte émotivité que ses amis relèvent. Sa vie est d’ailleurs tissée d’amitiés très fortes mais aussi d’inimitiés qui le font souffrir. Malgré de nombreuses difficultés relationnelles touchant à la fondation de l’Oratoire, Newman gardera, envers et contre tout, un certain optimisme jusqu’en ses dernières années de vie.

Personnage hors du commun, le cardinal se laisse aisément surprendre par la beauté des paysages ou des monuments. Attaché à la culture grecque et latine, il émaille ses lettres de citations poétiques ou tragiques. Très sensible à la musique (violoniste), il lui arrive de confier son sentiment aigu de l’affinité qu’il ressent avec elle. N’a-t-elle pas le privilège d’introduire au seuil du monde invisible auquel s’accorde la foi ?

Le voyage de six mois qu’il effectue en Méditerranée marquera sa vie. Il en gardera le souvenir d’une expérience douce-amère (découvertes de beautés mais aussi maladie, avec la menace très réelle de sa mort). Un de ses plus beaux poèmes date de cette époque : Conduis-moi douce lumière… La poésie, dira-t-il, est la détente de l’homme chargé et l’occupation du paresseux.

Livre passionnant pour qui aime Newman ou pour qui voudrait le connaître.

Marie-Luce Dayer

1 • Le cardinal Honoré avait publié en septembre 2010 dans notre revue un article intitulé Servir la vérité. John Henry Newman (n.d.l.r.)

 

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