Ce mouvement de pensée s’est développé en Argentine. Il est proche de la théologie de la libération plus connue outre-Atlantique. Ces deux écoles théologiques ont en commun, entre autres, la priorité pour les questions sociales et l’option préférentielle pour les pauvres.
Ce livre a le mérite de présenter de manière synthétique la pensée de l’auteur à partir de quelques écrits. Nous recommandons tout particulièrement son commentaire sur l’exhortation apostolique Evangelii Gaudium (EG), premier texte signé par le pape François et «feuille de route», selon le théologien, de son pontificat. L’analyse de Scannone aide à comprendre le langage imagé du pape dont le sens profond échappe à un aperçu superficiel. Par exemple, l’image du polyèdre, préférée à la sphère, en tant que modèle du Peuple de Dieu (et des peuples en général) correspond à une conception de l’unité qui n’implique pas l’uniformisation mais qui, au contraire, accueille et valorise les différences dans le cadre d’une «culture de la rencontre» que le pape appelle à favoriser au sein de l’Église. «Bien comprise la diversité culturelle ne menace pas l’unité de l’Église» (EG, §117).
Par ailleurs, Scannone insiste sur l’importance de la piété populaire, une des caractéristiques de la théologie du peuple qui revalorise cette forme de catholicisme, la qualifiant de «spiritualité populaire» et de «mystique populaire». Il s’agit là d’une des priorités du pape qui étonne beaucoup en Europe. Les dévotions populaires ne constituent pas seulement une des forces vitales de l’Église mais forment aussi, fécondées par l’Esprit saint, une source de sagesse. «Une culture populaire évangélisée contient des valeurs de foi et de solidarité qui peuvent provoquer le développement d’une société plus juste et croyante, et possède une sagesse propre» (EG §68).