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samedi, 06 octobre 2007 02:00

Le concile avec Dom Helder

camara40994lettrescamara40995lettres2Dom Helder Camara, Lettres conciliaires (1962-1965), Cerf, Paris 2006, 2 volumes, 1167 p.

Près de 300 circulaires écrites à la main pendant le concile Vatican II, entre deux et quatre heures du matin, au cours de ce que Dom Helder Camara appelait sa « veille ». Des textes adressés à « la famille », les proches du « Dom », d'abord à Rio de Janeiro, puis également à Recife, ville dont il devient l'archevêque en avril 1964. Une « mine gigantesque et quelque peu chaotique », comme la décrit le cardinal Etchegaray dans sa préface.

On n'y trouvera pas une relation systématique des événements qui ont marqué le concile, mais on y rencontrera surtout des personnes. D'abord celle de Dom Helder, avec cet esprit d'enfance qui, par exemple, le conduit au cirque : « Est-ce que vous trouvez absurde que je juge aussi important (...) d'aller au cirque que de prier ? Si je me trompe, c'est à cause de Celui qui a dit que quiconque ne se fera pas enfant n'entrera pas au ciel... La faute à Saint-Exupéry qui m'a appris à avoir grande pitié des personnes éternellement importantes et sérieuses... »

Avec aussi une soif de simplicité qui l'entraîne à rêver du jour « où le Vicaire du Christ pourra se libérer d'un faste qui fait la joie des snobs et des nobles et scandalise les petits et les sans-foi ». Avec, encore, cette conscience de la misère des peuples qui l'amène à « comploter » au sein du « groupe de la pauvreté ». Ou des convictions non-violentes qui l'opposent à ceux qui veulent maintenir la doctrine de la « guerre juste », mais qui lui font demander à Dieu qu'il n'y ait pas de vaincu au sein du concile : « Je n'aime pas avoir la moindre ombre d'animosité ». Ce qui ne l'empêche pas de souligner la « déroute du latin ».

On rencontre également dans ces pages d'innombrables amis de Dom Helder, parmi lesquels Frère Roger de Taizé et le cardinal Suenens, ainsi que des Genevois : Alphonse Bernasconi et le Père Raymond Bréchet, de choisir, qui l'invitent à venir à Genève où, à côté de visites au Conseil oecuménique des Eglises et au BIT, il admire l'horloge fleurie. Pourtant, « entre la Suisse, super-rangée, sans problèmes, et le cher Nordeste », il remercie Dieu de lui avoir donné le Nordeste.

Cette escapade l'oblige à manquer, exceptionnellement, une session conciliaire. Pourtant, même s'il est l'un des plus assidus, Dom Helder ne s'exprime pas une seule fois en séance plénière. « La mission que Dieu me donne est autre », relève-t-il. S'il est considéré comme l'un des ténors du concile, c'est par ses multiples contacts. « Son affabilité et sa simplicité ont fait merveille pour rapprocher des prélats qui ne se connaissaient pas », relève Etienne Fouilloux dans la postface de l'ouvrage. Dom Helder noue des liens avec les évêques d'Afrique et d'Asie qu'un souci commun de la pauvreté rapproche, avec des invités non-catholiques et des journalistes « dont il est rapidement devenu la coqueluche et l'un des principaux informateurs ».

Ces circulaires, conclut E. Fouilloux, conservent encore « un aspect prophétique, mais jamais privé du sens de l'humour ni de l'humilité constitutive de leur rédacteur ».

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