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jeudi, 02 mai 2013 11:21

L'esprit de François. Quand refuser la communion ?

Lorsque le cardinal Joseph Ratzinger fut élu pape, nous n'ignorions pas grand-chose au sujet de ses opinions théologiques ou de ses pratiques ecclésiales. Les idées de ce théologien avaient été abondamment publiées et partagées, notamment parce qu'il avait été préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi.

L'élection du cardinal Jorge Bergoglio s.j., en revanche, a élevé au pontificat un archevêque latino-américain au profil bas, dont on ne sait que peu de choses : surprise et mystère pour la plupart des fidèles. Jusqu'à présent, la simplicité de son style pastoral a suscité un accueil positif quasiment universel. Dans les semaines qui viennent, je vais tenter d'approfondir l'esprit du pape François en étudiant les quelques écrits, interviews et homélies dont on dispose. Ces documents peuvent nous aider à mieux le comprendre, tout en sachant que le pape peut, évidemment, modifier ses opinions dans le futur.

Je vais examiner aujourd'hui une pratique qui prête à controverse : le refus de la communion aux catholiques. Dans Sur la terre comme au ciel, livre d'entretiens avec le rabbin Abraham Skorka, le cardinal Bergoglio écrivait : « On pourrait refuser la communion à un pécheur notoire non repenti, mais ce sont des choses qui sont très difficiles à vérifier. » Il faut remarquer qu'il dit « pourrait » et non pas « doit ». En pasteur plein d'expérience, Jorge Bergoglio souligne la difficulté qu'il y a à vérifier si une personne est « un pécheur notoire non repenti ». De nombreux évêques américains, comme les cardinaux Francis George et Donald Wuerl, ont adopté des positions semblables. Mais dans le même temps, le cardinal Bergoglio dit qu'il ne serait pas juste de donner la communion à quelqu'un qui, « au lieu de rapprocher les gens de Dieu, porte atteinte à la vie de nombreuses personnes ». Pour lui, une telle personne ne saurait recevoir la communion, ce serait une contradiction totale.

Dans ce livre, la question de la communion n'apparaît pas dans le contexte de l'avortement, mais dans celui de l'injustice. Il parle de ceux qui « non seulement ont tué intellectuellement ou physiquement, mais aussi indirectement en usant mal des ressources matérielles et en payant des salaires iniques ». Il les appelle « hypocrites », car « en public, ils créent des associations charitables, mais ils ne versent pas à leurs employés des salaires correspondant à leur travail ou ils les engagent au noir ». Ainsi, si vous payez vos employés au noir, sans les déclarer, le pape François pourrait bien vous qualifier de « soi-disant » catholiques, affligés d'hypocrisie spirituelle et de schizophrénie. Il constate qu'il existe de nombreuses personnes de ce type « qui nichent au sein de l'Eglise et ne vivent pas selon la justice que Dieu proclame ». Si vous êtes de ceux-là, il pourrait vous enjoindre de vous demander si vous êtes en mesure de communier.

L'archevêque Bergoglio se méfiait particulièrement des personnages publics « soi-disant » catholiques, qui attendent la photo lorsqu'ils sont devant l'autel. « Dans ces cas-là, dit-il, je ne distribue pas moi-même la communion. Je reste en retrait et je laisse les autres ministres la donner, parce que je ne souhaite pas que ces gens viennent vers moi pour la photo. »

Voir les autres chroniques de Thomas J. Reese s.j.

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