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lundi, 13 mars 2017 17:08

Madagascar, la vente des terres des ancêtres

MadagascarEn 2008 et en 2009, un immense projet d’accaparement de terres a projeté Madagascar sur la scène internationale : le pays avait l’intention de louer 10 % de ses terres arables, pour 99 ans, à Daewoo Logistics, une société sud-coréenne qui voulait y planter du maïs et des palmiers à huile. Ce scandale a précipité la chute du président malgache. Depuis, le pays est plongé dans une interminable crise politique et économique. Et le projet de Daewoo Logistics est en train d’être réactivé.

Le cas malgache illustre bien les conséquences de l’accaparement des terres. Malgré les richesses naturelles de ses sous-sols, de ses forêts et de ses mers, Madagascar est l’un des pays les plus pauvres de la planète.

Pourtant, chez les Malgaches, la terre a une valeur sacrée. Le lien d’une personne avec la terre dure toute sa vie: de la naissance à la mort. À la naissance d’un bébé, on enterre le placenta juste à côté de la maison, parmi les vivants. C’est sur cette même terre que se trouvent les tombeaux familiaux, en dehors du village. Les champs qui nourrissent les familles se situent également sur cette terre. C’est tout cela que les Malgaches appellent tanindrazana, littéralement «la terre des ancêtres». Elle unit le peuple, elle relie le passé, le présent et l’avenir, parce qu’elle est à la fois la terre des ancêtres mais aussi celle des générations à venir.

Les soupirs des dépossédés
Bien que plus de 80% de la population malgache soit paysanne et vive directement de la terre, la malnutrition y est importante. Dans le discours qu’il a prononcé devant le parlement du pays le 11 mai 2016, l’ex secrétaire général des Nations Unies Ban-Ki-Moon a rappelé le coût de la faim à Madagascar: la malnutrition «chronique» qui sévit dans le pays entraîne la mort de 47% des enfants de moins de 5 ans. Le constat est clair: selon lui, la répartition injuste des terres est l’un des facteurs principaux expliquant cette situation.
Faute de codes (foncier et minier) et de structures permettant de contrôler l’exploitation des terres, un grand nombre de celles-ci se retrouvent entre les mains d’entreprises ou de propriétaires étrangers qui en récoltent les intérêts en toute «légalité». L’État, en effet, est cosignataire des accords de propriété. Afin de créer de nouvelles routes, des rizières récemment ont été réquisitionnées, sans aucune indemnisation. Quand la population s’est opposée à cet accaparement, les politiques ont fait la sourde oreille (Nyvalosoa du 12/05/16, p. 3). Étant donné les énormes sommes en jeu, ces pratiques constituent une nouvelle forme de blanchiment d’argent, accompagnée de corruption. Au bout du compte, ce sont les dirigeants du pays qui favorisent la dépossession de la population. Un acte que l’on nomme à Madagascar «vente de terre des ancêtres».

Sens dessus dessous
Ce problème préoccupe les Églises du pays. Dans son message de Pentecôte 2016, la Fédération des Églises chrétiennes de Madagascar a dénoncé le non-respect de la loi et la spoliation des terres: «Chacun tire parti de ce qu’il estime être normal.» Il s’agit, en somme, d’«une société sens dessus dessous [...]. C’est ainsi que les Malgaches vivent actuellement.»

Daniel Rakotoarivola,
pasteur de l’Eglise réformée de Madagascar (FJKM)

Action de Carême soutient TANY

photo MamyAction de Carême soutient la lutte contre l’accaparement des terres à Madagascar, via le collectif local TANY (terre, en malgache). Issu de la société civile, TANY informe la population, fait pression auprès des autorités pour qu’elles revoient leurs pratiques et travaille au renforcement des capacités des communautés locales pour qu’elles sachent mieux se défendre. La présidente de Tany, Mamy Rakotondrainibe, sera de passage en Suisse du 22 mars au 2 avril 2017.

Pour l’écouter, consulter ici  la liste des événements prévus durant la Campagne de Carême 2017.
Pour l’inviter dans une paroisse, s’adresser à Hélène Bourban, au + 41 21 617 88 81,

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