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mercredi, 06 février 2008 11:00

Un regard sur le monde

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Nous étions informés? Les signaux d'alerte avaient été multipliés. La crise financière devait arriver. Elle est là avec ses préoccupantes facettes financières et économiques. Elle ouvre ses portes à une sérieuse récession et à d'incontournables revendications sociales. Afin de calmer le jeu, de rétablir la confiance, des moyens sont mis en oeuvre et nous sommes abreuvés de discours brillants et de déclarations rassurantes. N'empêche que le prix à payer est et sera élevé. Car la vie quotidienne nous rappelle que les difficultés réelles se rencontrent effectivement sur les chemins des licenciements et de l'emploi, de la réduction des salaires, de l'accroissement des coûts. Les effets néfastes de la mondialisation rejoignent notre univers personnel. A ce propos, et même si le raccourci peut surprendre, les errances actuelles des politiques monétaires nous incitent à nous interroger sur notre relation personnelle à l'argent, à la consommation, à notre style de vie. Cette question tombe bien puisque, dans quelques jours, les chrétiens vont entrer en Carême et que cette étape se présente justement comme un temps de réflexion, de méditation, de sincérité envers soi-même, voire de solidarité.

Dans ce numéro de choisir[1], nous sommes informés sur un autre aspect de la réalité : la préservation de la terre. Une fois encore, depuis le Protocole de Kyoto (entré en vigueur en mars 1994) jusqu'à la Conférence de Poznan sur les changements climatiques (décembre 2008) et en attendant la 15e Conférence des Nations Unies à Copenhague (décembre 2009), nous ne pouvons plus dire que nous ne sommes pas au courant de la dégradation de notre environnement et de notre responsabilité commune en la matière. A cet égard, les documents de la Campagne oecuménique, organisée du 25 février au 12 avril 2009 par Action de Carême, Pain pour le prochain, en collaboration avec Etre partenaires et oeku-Eglise et environnement, méritent d'être consultés.[2]

Si nous désirons mieux percevoir l'arrivée prochaine d'une crise écologique majeure, n'hésitons pas non plus à lire le dernier ouvrage de Michel Serres, La Guerre mondiale.[3] Comme le dit l'auteur : « Je livre ici le livre de mes larmes? Je livre ici le livre de mon âme. » Dans cet essai, où s'entrelacent histoire et mythes, les juristes seront particulièrement intéressés par l'analyse schématique de toute guerre. La guerre, parfois qualifiée de juste, est une institution sociale, collective, une institution de droit avec son protocole classique : une déclaration de guerre, puis la fin formatée des hostilités entre belligérants par une convention d'armistice. Avec le terrorisme, nous entrons dans la violence du non-droit, sans adversaires repérables, sans déclaration préalable, sans accords envisageables. En allant plus loin, nous constatons que si un tribunal peut définir la guerre et poursuivre les auteurs de crimes contre l'humanité, il n'en va pas de même dans le cas du terrorisme, ni a fortiori dans le cas de la guerre qui est menée par nous contre le Monde. Il s'agit de celle qui oppose l'humanité entière à son environnement global : plantes, animaux, terres, montagnes, mers et climats. Nous connaissons aussi la formule qui nous dégage habilement du débat : « Responsables, mais pas coupables ! »

Cette approche philosophique et juridique ravive à souhait les données oecuméniques du Rassemblement européen de Bâle (1989) sur le thème mobilisateur de la justice, la paix et la sauvegarde de la création.[4] Là où nous nous trouvons en ce moment, et d'une manière pragmatique durant les semaines qui préparent le temps pascal, il conviendrait d'évaluer nos comportements dans notre cadre habituel de vie. Les exemples abondent : les transports, l'eau, l'électricité, l'alimentation, les déchets, etc. Voilà une originale et opportune invitation à entrer dans une démarche personnelle de réflexion sur notre responsabilité commune quant à l'avenir de notre planète. Nous sommes informés?

 

1 - Voir Martin Egger, Justice climatique, Otto Schäffer, L'énergie, un défi éthique, René Longet, Comment rester mobile sans pétrole ? aux pp. 9-21.

2 - Info-Campagne 2009. Un climat sain pour assurer le pain quotidien. Publié en 2008 par la Plate-Forme interreligieuse de Genève, le Calendrier interreligieux « Ecologie et Spiritualité » illustre également cette perspective.

3 - Le Pommier, Paris 2008, 198 p.

4 - Voir le dossier Rassemblements oecuméniques européens.

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