Deux magnifiques ouvrages, tant dans le contenu que dans la présentation, nous ouvrent (enfin !) les portes de la théologie africaine par des Africains. Une vingtaine d'auteurs du continent noir sont présentés de manière fort avenante : une biographie resituant le théologien dans son contexte - allant des années pré-conciliaires à l'aube du XXIe siècle - nous introduit au personnage et donne souvent des éléments de compréhension à la deuxième partie des entrées, celle des résumés de leur pensée théologique. Une véritable bibliothèque d'auteurs chrétiens africains contemporains ! Les noms de Mulago, Semporé, Mveng, Uzukwu, Kagame, Mpongo et Magesa, entre autres, font désormais partie de la richesse de réflexion théologique de l'Eglise entière, au même titre que des Rahner, Schillebeeckx et autre Küng ! Et pour chaque auteur présenté, est attachée une bibliographie sélective de ses oeuvres.

Non seulement les présentations des théologiens nous informent didactiquement sur leur pensée et leurs réflexions, mais elles mettent en exergue les nouveautés que les rencontres, par exemple entre droit canon latin et traditions Bantu, ou entre dogme de la Trinité et conceptions Luba de la divinité, ont suscitées dans l'esprit et sous leurs plumes. Pratiquement tous les thèmes de la théologie ont été traités par l'un ou l'autre. Dès lors, ces deux ouvrages présentent un abrégé de la pensée catholique africaine à propos du dogme, des sacrements, de la doctrine sociale de l'Eglise, de l'ecclésiologie, de l'oecuménisme, du dialogue interreligieux? Mieux encore, ils constituent une excellente somme bibliographique pour étudier à parts égales des théologiens non-occidentaux dans la pensée catholique universelle. Car chaque continent, par sa production de théologiens autochtones qui font le lien entre universalité et localité de l'Eglise, entre principes et acculturations, alimentent l'indispensable et long chemin d'inculturation du message évangélique. Et qui aujourd'hui s'en tiendrait uniquement à son milieu culturel lorsque l'on prétend devenir toujours plus et mieux? catholique?

En fin de volume, des textes sur le débat entre théologies africaine et occidentale et sur une réunion de théologiens africains en 1977 nous font prendre conscience que l'impact de tels événements touchant à la vie de l'Eglise universelle, tout comme la diffusion à plus large échelle de la pensée qui en découle, font encore défaut en Occident. Car la catholicité et de l'Eglise et de la théologie passe par là : considérer désormais tous les « réservoirs » de pensée théologique, européen, africain, asiatique, américain et océanien, comme des partenaires égaux de réflexion doctrinale et de pratique pastorale, enrichissant les autres de par leur diversité et innovant de par leur contexte et leurs propositions. Aujourd'hui, Nairobi et Innsbruck, Abidjan et Paris, Johannesburg et Rome sont condisciples de classe?