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mardi, 02 juin 2015 16:00

Retour à l’intériorité

Jacques Gauthier
Dix attitudes intérieures
La spiritualité de Thérèse de Lisieux
Novalis, Cerf 2013, 180 p.

Alors que la carmélite Thérèse de Lisieux, docteur de l’Eglise depuis 1997, n’a pas laissé de système théologique ou de traité spirituel où seraient décrites les différentes étapes de la montée vers Dieu, l’auteur de ce livre nous offre cinq caractéristiques de la « théologie de Thérèse » : spirituelle, pratique, narratrice, existentielle et « espérante ».
Il relève que l’autobiographie, écrite à la demande de sa supérieure,[1] dévoile un « Je » (libre) et un « Tu » (Jésus), jusqu’à ce qu’elle devienne « un » en Jésus, tout en restant elle-même. Thérèse, tributaire de son temps, d’une époque qui n’est de loin pas la nôtre, nous parle pourtant ainsi profondément.


Pour nous aider à comprendre sa spiritualité, Jacques Gauthier nous propose dix attitudes intérieures, développées en dix chapitres. Elles vont traiter des imperfections à supporter, de l’espérance, de la miséricorde divine, du désir de grandir en choisissant la petite voie, du retour continuel à l’Evangile afin de tout faire par amour, de l’abandon à Dieu dans la prière afin d’étancher notre soif et de nous unir au Christ. Un parcours qui nous conduits vers l’acceptation de nos limites, en perdant notre « petit rien » dans « l’infini Tout ».
Aujourd’hui, en Occident, nous sommes inondés d’images et de bruits qui nous éloignent de l’intériorité et nous embourbent dans un grand vide où priment rentabilité et performance, alors que, selon Patrice de la Tour du Pin, « il suffit d’être » et, imparfaits, de nous ouvrir au manque que seul Dieu peut combler. Dieu aime en nous et nous rend « légers et audacieux », comme la petite fille espérance de Péguy.
A l’époque de Thérèse, les scrupules jansénistes et un moralisme étroit masquaient le visage d’un Dieu de tendresse. Mais chez elle, la culpabilité et la peur du châtiment ne tiennent pas devant l’amour et la confiance. Dans une de ses lettres, elle se compare à un zéro ... mais un zéro qui, placé du bon côté, après l’unité, devient puissant. Sa petite voie l’a libérée des carcans, elle l’a en quelque sorte démocratisée.
La prière est plus qu’un rite, c’est une expérience de foi à vivre de l’intérieur, un chemin d’amour. Reste la longue traversée de la nuit, de la maladie, face à laquelle elle ne se révolte pas : « Ah ! ce que j’ai souffert, je ne pourrai le dire qu’au Ciel ! » On retrouve là la lucidité et la légèreté de la petite fille espérance. Elle a donné un sens à sa nuit, par sa soif de sauver ses frères, en s’asseyant à leur table et en mangeant leur pain.

[1] • Les Manuscrits autobiographiques. (n.d.l.r.)

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