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jeudi, 03 mars 2016 15:46

Chute et résurrection

Timothy Radcliffe 
Chemin de croix 
Paris, Cerf 2015, 132 p.

L’auteur, dominicain, a été maître de l’ordre des prêcheurs de 1992 à 2001 et s’est fait connaître internationalement par ses analyses et ses prises de position courageuses et libres, ouvertes sur la société contemporaine et enracinées dans la tradition.
La première station de son chemin de croix commence par une phrase cinglante : « Le procès de Jésus est une farce ! Pilate ne le croit pas coupable... Est-il un cynique las, qui n’a rien à faire de la vérité ? A-t-il peur des accusateurs ? » De là, l’auteur pose son regard sur notre monde où tant de gens subissent l’exécution pour des raisons semblables ! Les Noirs pauvres des Etats-Unis sont souvent condamnés à mort sans être réellement défendus par leurs avocats, qui semblent se désintéresser de leur cas. Et nous ? N’agissons-nous pas souvent ainsi, condamnant des gens sans prêter attention à ce qu’ils pensent et font réellement ?


Dans la troisième station, après nous avoir rappelé que nous avons tous connu diverses « premières » chutes, Timothy Radcliffe propose à chacun de se regarder dans un miroir : « Nous ne sommes ni les parents parfaits, ni les époux admirables, ni les prêtres pieux, sans tache, que nous avions peut-être imaginés ! Mais Dieu nous sourit tels que nous sommes. »
Dans la cinquième station, Jésus a besoin d’aide. La culture occidentale a promu l’idéal d’un être autosuffisant. Or, en Jésus, nous voyons un Dieu qui a besoin de nous.
Sixième station : si Jésus tombe pour la seconde fois, alors que Simon de Cyrène l’aide, c’est qu’il est vidé de toutes ses forces. Comment regardons-nous les personnes physiquement faibles dans cette société qui adule les forts ? Il y a ceux, au bas du tableau, qui deviennent invisibles aux autres ... humiliés. Par sa troisième chute, Jésus se rapproche d’eux. Mgr Oscar Roméro avait adopté une maxime d’Irénée de Lyon : Gloria Dei vivens pauper (La gloire de Dieu, c’est que le pauvre vive).
Dixième station : Jésus, dépouillé de tout, est nu sur la croix. Ses vêtements même deviennent un butin. Il est devenu monnayable, comme le sont au­jourd’hui tous ceux qui sont achetés et vendus, Quant à sa mort sur la croix, les évangélistes ne la décrivent pas de la même manière... Aucun ne parvient à capter entièrement le mystère (trahison, abandon, solitude, dénuement). En Jésus, Dieu prend en charge ce que l’on nomme parfois l’« absence de Dieu ».
Après la mise au tombeau, tout a l’air fini, mais nous sommes à l’orée d’un commencement. La touche créatrice de Dieu ne peut être défaite par un arrêt de mort, nous dit l’auteur, qui cite un poète, Georges Lackay Brown : « Demain le Fils de l’homme marchera dans un jardin, à travers une avalanche de fleurs de pommiers. » La grâce de Dieu apporte le printemps pour chacun d’entre nous.

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