Pour le philosophe Jacques Maritain, il fallait avoir le cœur et l’art assez purs pour peindre le mal sans connivence. D’où une vive discussion avec François Mauriac, qui aimait à se définir comme un catholique qui fait des romans, et qui était tourmenté, comme ses écrits en témoignent. La connivence du romancier est indispensable, disait Mauriac, elle est la condition de son art, car le romancier est un créateur de vie fictive et s’identifie à la créature. Les passions du cœur sont donc le pain et le vin de l’écrivain. Les décrire sans connivence est à la portée du philosophe et du moraliste, non de celui dont l’art consiste à rendre sensible l’imaginaire, ce monde plein de délices criminels mais aussi de sainteté.
Georges Bernanos se situait, lui, au-delà du carcan de la psychologie sociale ou individuelle. La grâce est l’axe de l’action, elle dessine et détermine les personnages, pensait-il. Et c’est le néant existentiel, la vacuité et la mort de l’âme qui traduisent l’absence de Dieu. Mais si ce métier d’écrivain est une aventure spirituelle, c’est aussi un calvaire. « Mes livres et moi ne font qu’un », dira-t-il.
Autre participant au colloque, l’écrivain Gabriel Ringlet, qui montre comment le personnage de Dieu est abordé dans quelques fictions. Ainsi Jean Grosjean raconte la Bible en en faisant un récit. Il comble les ellipses du texte et rend l’énigme qui le traverse : Dieu nous échappe car il passe, il est furtif.
Ce livre retient l’attention parce qu’il pose la question : le roman, la poésie, la littérature en général nous parlent-ils mieux de Dieu que la théologie ?