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lundi, 05 août 2019 15:36

N'oubliez pas les Yézidis!

Bahar a subit deux ans de captivité. Elle ne connaît pas le sort de la plupart des membres de sa famille. ©Sergi Camara/JRS

Cinq ans après que des militants de l’État islamique (EI) aient démarré un génocide (reconnu par l'ONU) contre la communauté yézidie à Sinjar, dans le nord de l'Irak, des centaines de milliers de Yézidis sont toujours déplacé et vivent dans des conditions difficiles. Ils ont en plus le sentiment d'avoir été oubliés.
Le Service jésuite des réfugiés (JRS) appelle la communauté internationale à garantir la sécurité du peuple Yézidi et à fournir un soutien pour la reconstruction de Sinjar.

Depuis le 3 août 2014, les attaques de l'État islamique ont fait des milliers de morts: les Nations Unies estiment que 5000 hommes yézidis sont morts dans le massacre. Ceux qui refusaient de se convertir à l'islam ont été exécutés et jetés dans des fosses communes; de nombreux garçons ont été forcés de devenir enfants soldats. On estime que 7000 femmes et filles yézidies, dont certaines n’avaient que neuf ans, ont été réduites à l’esclavage et transférées de force en Irak et dans l'est de la Syrie. Détenues comme esclaves sexuelles, les survivantes ont déclaré avoir été vendues à plusieurs reprises, données ou passées parmi les combattants de l'État islamique.

Ces atrocités ont été reconnues comme un génocide par les Nations Unies en 2016. Tant de Yézidis ont été portés disparus que l'esclavage des femmes n'a pas immédiatement été repéré par la communauté internationale. Plus de 3000 d'entre elles sont portées disparues à ce jour.

Voir le reportage photo de Giacomo Sini de juillet 2017: Kurdistan Irakien: le combat des Yézidis

L’insécurité persiste

Les combattants kurdes et yézidis ont repris le contrôle de Sinjar en novembre 2015, mais la situation sécuritaire reste instable. Mines terrestres et pièges jonchent la zone, ce qui entrave la difficile tâche de reconstruction. Il n'y a pas d'approvisionnement fiable en eau ou en électricité; et en dehors des grandes villes, il n'y a pas d'écoles et pas d'hôpitaux. Les opportunités de travail et les offres d’emploi sont minimales. Quelques 70 fosses communes sont encore béantes et non-protégées.

Seulement un quart des habitants originaux yézidis de Sinjar ont essayé de retourner dans leur village ruiné, et 300'000 Yézidis vivent actuellement dans des camps de déplacés ou des colonies informelles dispersées dans la région du Kurdistan du nord de l'Irak, en particulier dans le gouvernorat de Duhok. Ils sont exposés à des conditions météorologiques extrêmes, et les défis de l'insuffisance des infrastructures d’eau et d'assainissement persistent.

Troubles psychiques en hausse

Les conditions de vie, le manque de stabilité dans la région et un sentiment constant de peur et d'insécurité rendent la récupération physique et émotionnelle plus difficile pour les survivants du génocide. Les perspectives de sortie en déclin ont conduit à une forte augmentation des suicides, de stress post-traumatique, de troubles du comportement et de dépression aigüe. Il y a une forte incidence d'idéation suicidaire parmi les Yézidis âgés de 15 à 25 ans. Les jeunes perdent espoir en l’avenir et se sentent abandonnés.

«Où sont nos hommes, nos femmes, nos enfants et nos filles? Nous savons qu'ils sont toujours dans les camps en Syrie, mais ils ont trop peur de dire qu'ils sont yézidis», explique Layla, qui a enduré deux ans en captivité à Raqqa, en Syrie, avant que son frère ne soit en mesure de payer la rançon demandée par l'État islamique. «Ma famille est toujours portée disparue. La vie est très difficile et nos maisons sont bombardées. Nous voulons faire confiance à nouveau et nous voulons une protection.»

#DoNotForgetUs

À l'occasion du cinquième anniversaire du génocide, le JRS appelle la communauté internationale à garantir la sécurité du peuple Yézidie et encourage les autorités locales à mettre en œuvre, dans l'attente d'un possible retour des Yézidis sur leurs terres, des solutions dignes pour ceux qui n'ont pas de perspective immédiate de retour volontaire. Avec sa campagne #DoNotForgetUs (Ne nous oubliez pas), l'organisation jésuite cherchent à faire entendre les voix des survivants, en partageant certains de leurs témoignages. 

Le JRS aide les Yézidis déplacés dans le nord de l'Irak depuis octobre 2014. Il effectue des visites à domicile et fournit une aide matérielle aux familles les plus vulnérables. Il gère également des centres de formation qui offrent des programmes éducatifs structurés pour les enfants et les jeunes, ainsi que des formations professionnelles pour adultes. Le JRS fait des efforts considérable pour fournir un soutien professionnel en santé mentale et psychosociale aux survivants du génocide afin qu'ils puissent redécouvrir l'espoir.

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