«Les traditionalistes d’Écône ont adressé au pape François une ‹correction filiale› aux termes très peu filiaux et pieusement datée en la Fête de Notre-Dame du Mont-Carmel. L’opinion publique ne devrait pas trop s’en émouvoir. Rien de bien nouveau de la part des traditionalistes, une intervention de plus, dans une longue tradition de désobéissance à l’Église et de remise en cause du magistère du Concile et des papes qui l’ont appliqué.
Outre les rédacteurs, ce long document de 25 pages rallie, paraît-il, des personnes qualifiées de scientifiques et deux cardinaux un peu têtus, adversaires bien connus du pape François. Le ton est parfaitement hypocrite, multipliant les courbettes et les protestations d’obéissance et le souci de l’Église; est critiqué, avec une sérieuse dose d’arrogance, l’enseignement du pape.
Sans oser l’accuser du péché d’hérésie et du crime canonique, mais tout en le laissant entendre, les auteurs de la correction prétendent se soucier seulement ‹des propositions hérétiques propagées par les paroles, les actions et les omissions de Votre Sainteté›. Ils en ont repéré pas moins de sept dans l’exhortation apostolique Amoris laetitia! Leur argumentaire se limite à des propositions théologiques et canoniques, sans prêter la moindre attention à la dimension pastorale du message évangélique. L’art du discernement pastoral qui distribue le pain de la Parole aux petits est sacrifié sur l’autel d’une théologie confondue en idéologie. Les explications des interprètes autorisés du pape (vardinal Von Schönborn) et du Synode, les propos des cardinaux et des évêques sont balayés avec suffisance.
Le fait que le document est signé, entre autres, par Mgr Fellay fait mentir les nouvelles habilement orchestrées qui voulaient faire croire que le rapprochement entre Rome et Écône était imminent. À en juger par la teneur du document présent, le fossé reste aussi infranchissable qu’aux débuts de la Réforme, au XVIe siècle. Pensez-donc! Le pape François est un moderniste et un luthérien. Les bons apôtres écrivent sans trembler: ‹Nous nous sentons obligés en conscience de mettre en évidence la sympathie sans précédent de Votre Sainteté à l’égard de Martin Luther, et l’affinité entre les idées de Luther sur la loi, la justification et le mariage, et ce qu’enseigne ou favorise Votre Sainteté dans Amoris laetitia et ailleurs.› Un reproche qui ne manque pas d’aplomb de la part d’un groupe qui, depuis la fin du Concile, semble avoir chaussé les bottes de Luther pour se tenir à distance du magistère de l’Église hiérarchique.
Pour justifier leur initiative de rendre publique leur document, les auteurs de la correction dite filiale reprochent au pape François de n’avoir pas répondu de manière positive aux dubia (doutes) qui lui avaient été soumis par quatre cardinaux suite à la publication de l’exhortation apostolique Amoris laetitia sensée propager des hérésies. La réponse avait été largement donnée par diverses interventions publiques des commentateurs officiels de l’exhortation apostolique. Mais elle n’allait pas dans le sens voulu par les traditionalistes!»