Pierre Teilhard de Chardin estimait que la Création était en constante évolution et que l'être humain était partie prenante de ce mouvement. Il unifiait la théorie de l'évolution de Charles Darwin, la géologie de Vernadsky et la théodicée chrétienne en une approche holistique. Pour lui, le « phénomène humain » devait être pensé comme une étape de l'évolution conduisant au déploiement de la noosphère (la sphère de la pensée humaine), préparant l'avènement de la figure dite du Christ Cosmique. Selon le jésuite, qui était également géologue et paléontologue, en situant la Genèse en un point Alpha du temps, l'Homme devait rejoindre Dieu en un point Oméga de parfaite spiritualité. Il estimait que la théologie catholique pouvait aider à ce processus si elle en épousait le mouvement évolutif. Ce genre d'idées lui a valu de se retrouver dès le début en porte-à-faux avec les autorités de l'Eglise. Dès les années 1920, ses supérieurs jésuites l'empêchèrent de publier ses écrits, puis d'enseigner. Ils l'exilèrent finalement en Chine, où il s'adonna à la recherche de fossiles. En fait, la plus grande partie de son travail ne fut publié qu'après sa mort, en 1955. En 1962, le Vatican diffusa un avertissement formel sur « les dangers représentés par les écrits de Pierre Teilhard de Chardin et ses disciples ».
Mais, si ses écrits restent relativement marginaux, ces idées sur la foi et la science jouissent toujours d'une certaine influence. Selon le journal américain National Catholic Reporter (NCR) elles connaissent même un intérêt renouvelé dans l'Eglise catholique. Le journal mentionne, par exemple, certaines déclarations de Benoît XVI, qui, il y a quelques années, a loué la « formidable vision » de Teilhard de Chardin d'un univers qui serait un « hôte vivant ». Et d'après le NCR, le pape François a lui aussi évoqué des concepts proches de ceux de son défunt collègue jésuite concernant le développement de la conscience humaine. Les observateurs du Vatican assurent qu'il ne serait pas surprenant que Pierre Teilhard de Chardin fasse son apparition dans l'encyclique sur l'environnement que le pape est actuellement en train d'écrire.
Pour le Père jésuite Paul Crowley, de l'Université de Santa Clara, en Californie, Pierre Teilhard de Chardin est actuellement plus cité ou évoqué que jamais dans le magistère de l'Eglise catholique. L'une des raisons de ce intérêt renouvelé est le fait que sa pensée entre en résonance avec les problèmes globaux actuels, notamment écologiques, et la demande d'une réponse holistique à ces derniers. Ses théories devraient faire l'objet d'une « attention théologique substantielle » et être réappropriées. Reste qu'un des principaux problèmes avec Pierre Teilhard de Chardin est que sa pensée est largement reprise par des tenants des théories du Nouvel Age, pas forcément crédibles, ni fiables. (apic/ncr/réd.)