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jeudi, 20 mai 2021 10:14

Votations du 13 juin sur les initiatives «agricoles»

Epandage en Eure (France) © Philippe Lissac/GodongLa Commission nationale suisse Justice et Paix a examiné en détail les demandes et propositions de l’initiative pour l’eau potable et de l’initiative contre les pesticides sur lesquelles le peuple suisse est appelé à voter le 13 juin 2021. Les demandes de ces deux initiatives en lien avec la politique agricole suisse sont justifiées sur le plan éthique, dit-elle, car «il faut indéniablement agir». La commission apporte toutefois des nuances et juge l’initiative sur les pesticides mieux ficelée que sa sœur ainé.

Les deux initiatives -l’initiative populaire Pour une eau potable propre et une alimentation saine. Pas de subventions pour l’utilisation de pesticides et l’utilisation d’antibiotiques à titre prophylactique (initiative pour l’eau potable) et l’initiative populaire Pour une Suisse libre de pesticides de synthèse (initiative contre les pesticides)- visent une meilleure protection de l’environnement. Elles ont été respectivement déposées en janvier et mai 2018. «La nécessité d’agir en matière d’eau potable et de contamination par des pesticides n’est guère remise en question. Avec la Politique agricole 22+, le Conseil fédéral souhaitait limiter l’utilisation de pesticides, réduire les excédents d’azote et freiner les émissions de gaz à effet de serre. Le projet du Conseil fédéral ayant été rejeté par les Chambres fédérales, avec le soutien de l’Union suisse des paysans, ces deux initiatives ont un poids particulier», écrit dans un communiqué de presse la Commission nationale suisse Justice et Paix. Les personnes qui souhaitent que la politique agricole suisse soit davantage durable et écologique les considéreront donc avec attention.

Il faut indéniablement agir

La Commission nationale suisse Justice et Paix partage les inquiétudes et demandes du comité d’initiative. «Dans de nombreuses régions de Suisse, l’eau potable est contaminée par des nitrates et pesticides. L’orientation principalement agro-industrielle de l’agriculture suisse n’est pas durable sur le plan de l’éthique environnementale, et le capital naturel risque d’être durablement affecté pour les générations futures. L’adoption des deux initiatives entraînerait une transition fondamentale dans la politique agricole de notre pays. (...) Toutefois une décision politique fondamentale doit être prise quant à la manière dont les objectifs environnementaux doivent être atteints dans l’agriculture. Les consommatrices et consommateurs ainsi que la question de la demande en général doivent être intégrés à cette transition fondamentale dans la production de denrées alimentaires.» Les deux initiatives, en effet, se focalisent sur l’aspect productif des denrées agricoles, la responsabilité des consommatrices et consommateurs étant secondaire. «L’initiative pour l’eau potable ne vise même que les agriculteurs suisses, sans interdire l’utilisation de pesticides par les pouvoirs publics ou jardiniers amateurs. Elle ne contient pas non plus de dispositions concernant les denrées importées. L’initiative contre les pesticides est plus cohérente à cet égard, puisqu’elle vise aussi à interdire l’importation de produits agricoles qui ont été obtenus en recourant à des pesticides de synthèse.»

Les opposants aux initiatives critiquent avant tout la focalisation unilatérale sur l’agriculture et la production de denrées alimentaires. Ils craignent des pertes d’emplois et un recul de la production agricole nationale. Ils arguent qu’il faudrait alors augmenter les importations depuis l’étranger. Ils craignent par ailleurs pour la souveraineté alimentaire.

Évaluation éthique

«Éthiquement, les deux initiatives soulèvent un défi, il est évident qu’il faut agir pour atteindre les objectifs de protection du climat et de l’environnement», insiste Justice et Paix. «Toutefois, il n’est pas établi que les mesures prévues sont appropriées pour atteindre ces objectifs. Des effets de transfert vers l’étranger sont possibles, et le bilan carbone de certains aliments pourrait donc être pire qu’en cas de statu quo. L’initiative pour l’eau potable ne prévoyant ni une protection des importations ni un quelconque soutien économique, le risque est que les domaines particulièrement intensifs comme l’élevage de poulets ou de porcs, la culture de baies et légumes ainsi que la viticulture en concluent qu’il est plus intéressant pour eux d’intensifier encore la production et de renoncer aux paiements directs. L’économie primerait alors l’écologie. Ce dilemme est nettement moins prononcé dans le cas de l’initiative contre les pesticides.»

Justice et paix, se référant au pape François et à Laudato si', insiste sur l'urgence de garder notre monde viable pour les générations futures, ce qui demande «une attention équivalente à l’environnement et aux personnes défavorisée. (...) la solidarité avec la nature et les êtres humains n’est pas gratuite et l’écologie (humaine) doit primer sur l’économie. Une décision politique fondamentale (y compris sur le plan socio-éthique) doit être prise quant à la manière dont les objectifs environnementaux doivent être atteints dans l’agriculture. L’orientation agro-industrielle adoptée jusqu’à maintenant par l’agriculture doit être remplacée par une écologie agraire globale. Les consommatrices et consommateurs ainsi que la question de la demande en général doivent être intégrés à cette transition fondamentale dans la production de denrées alimentaires», conclut la commission des évêques de Suisse.

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