La recette pourrait paraître ringarde et moralisante, si la récente expérience du confinement ne nous en avait pas administré la preuve par l’acte. Pour la majorité des confinés, la leçon a été convaincante. Sans fréquenter l’université, ils ont compris que le chemin du bonheur passe par le prochain. Privée de relations, la vie devient vite insupportable. La personne est malheureuse lorsqu’elle n’a pas d’autre voisin qu’elle-même. Si des moments de solitude peuvent être bienfaisants, le repli narcissique étouffe tout aussi sûrement que le virus. On en meurt, en dépit de tout ce qu’il est possible de posséder ou d’accumuler en une vie. Parce que l’homme est viscéralement un être social, seule la présence de l’Autre apaise sa nostalgie congénitale. Les sagesses l’ont enseigné, l’expérience le prouve. Bienheureux ceux qui se quittent eux-mêmes pour se tourner vers les autres. Nous voilà invités à toutes ces sorties de soi que l’Évangile appelle des instants de bonheur, les Béatitudes.
Depuis les origines, la soif du bonheur tourmente Adam, telle une blessure que seule «une aide qui lui corresponde» peut guérir. Malgré l’environnement paradisiaque dans lequel il se trouve, le bonheur n’est pas au rendez-vous. Reste une béance. Le premier cri de bonheur n’éclatera dans le monde qu’avec l’apparition de l’Autre, Eve en l’occurrence, la chair de sa chair, le complément d’être qui lui permet d’exister pleinement. Je est un autre, a dit le poète.
Choisir s’interroge sur ce que le bonheur peut bien signifier, en questionnant l’argent séducteur, les sagesses prometteuses, qu’elles soient bibliques, hindoues ou bouddhistes, les utopies littéraires, les moments de petits ou grands bonheurs jusqu’au seuil de la mort. Autant d’approches suggérées, avec la conviction qu’il revient à chacun de réussir sa sortie vers le bonheur. Un dossier sur les couleurs, étincelles de bonheurs, évoquera le paradis perdu ou à venir.