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mardi, 03 mai 2016 17:31

Vieillir avec la Bible

Anne Sandoz Dutoit
Vieillir. Un temps pour grandir
Bière, Cabédita 2014, 96 p.

L’auteure travaille comme bénévole dans un établissement médico-social. Les personnes âgées ne lui sont donc pas étrangères et la Bible non plus. Une Bible qu’elle va citer avec justesse tout au long de son livre, lequel se lit avec intérêt et émotion.

Cet ouvrage est né, dit-elle, du désir de marquer le respect, la tendresse et la reconnaissance qu’elle éprouve à l’égard des aînés. En avançant dans son projet, elle s’est souvent demandé « comment parler de la vieillesse » alors qu’elle n’a pas atteint l’âge de la retraite. Une chose est sûre, elle s’adresse à toute personne qui veut prendre conscience que vieillir est l’affaire de chacun et qu’on peut construire sa vieillesse avant de se sentir vieux.
La Bible va donc l’entraîner, et nous entraîner, à la suite d’Abraham, Sarah, Elisabeth, Zacharie, Jacob, Joseph et ... Jésus. Dans le deuxième chapitre, Anne Sandoz Dutoit analyse très finement Caïn et Abel. Caïn qui « croit » savoir quels sont les sentiments de Dieu à son égard, qui pense être moins aimé et qui, sur une accumulation de malentendus, d’interprétations fondées sur rien, finira comme on le sait.
Avec Jésus, nous touchons le monde des sourds-muets et des aveugles, qui nous renvoient, au sens figuré, à une incapacité de compréhension. Ce Jésus qui appelle « les yeux à s’ouvrir, les oreilles à entendre, le cœur à comprendre ». Voilement, dévoilement, compréhension et incompréhension. Et l’auteure de revenir aux personnes âgées dont les contacts humains se raréfient, et pour lesquelles les sons se font de plus en plus étouffés et les contours plus flous. C’est peut-être l’occasion ultime, nous dit-elle, de naître à une vie intérieure qui n’a pas eu le temps d’être cultivée auparavant.
A travers les textes de la Bible qu’elle propose, se pose la question : « Comment interpréter la division du temps et de l’espace ? » Le lecteur n’est-il pas invité à prendre de la distance par rapport aux repères quotidiens auxquels il est habitué, pour aller au-delà de la réalité finie ? Jésus n’invite-t-il pas ses contemporains - et nous aujourd’hui - à adopter un autre mode de compréhension où la logique divine vient élargir la vision habituelle ? Ce sont des personnes âgées (Syméon et Anne) qui perçoivent ce qui se concrétise dans l’enfant Jésus. L’humain âgé est donc, selon l’auteure, celui qui peut replacer ses cadets dans un tissu narratif plus vaste.
Et de terminer avec ce regard ébloui : « L’existence de l’être humain n’est vie véritable que si elle se laisse prendre dans le mouvement du Souffle divin, qui Lui seul donne l’intelligence du cœur. » Merci pour ce beau regard.

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