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jeudi, 31 octobre 2019 12:52

Le capitalisme expliqué à ma petite-fille

Écrit par

Ziegler 1Jean Ziegler
Le capitalisme expliqué à ma petite-fille
(en espérant qu’elle en verra la fin)
Paris, Seuil 2018, 128 p.

Développer des entreprises qui font des affaires -et des bonnes- à travers tous les continents, qu’y a-t-il là de répréhensible? C’est la question que pose Zohra, la petite-fille de Jean Ziegler, à son grand-père qui a débattu, et s’est débattu, face à Peter Brabeck, le président de Nestlé, la société transcontinentale de l’alimentation la plus puissante du monde. Au cours de leur entretien télévisé, Brabeck s’est fait le chantre de l’ordre capitaliste, prétendant qu’il représente la plus juste forme connue d’organisation de la planète: alors que l’humanité a croupi dans la pauvreté pendant la majeure partie de l’histoire du monde, des milliards de personnes se retrouvent riches, bien nourries, propres et en sécurité depuis l’invention du système capitaliste. Du coup Jean Ziegler s’indigne.

Constamment relancé par les questions pleines de bon sens de Zohra, le sociologue explique à sa petite-fille ce qu’est le capitalisme, son origine, ses conséquences funestes, l’injustice congénitale qui a engendré «l’ordre cannibale du monde». Les grandes sociétés transcontinentales n’ont qu’un but, le profit. Pour y parvenir, ignorant les États et les instances internationales, elles n’hésitent pas à délocaliser leur production au mépris du bien commun, à exploiter des régions du tiers-monde, à recourir au travail des enfants, à soutenir des dictateurs et à soustraire leurs profits au contrôle des États en les expatriant dans des paradis fiscaux. Résultats des courses: les inégalités s’accroissent, les riches deviennent de plus en plus riches et les pauvres de plus en plus pauvres.

Jean Ziegler revient sur l’essentiel des thèmes qui l’ont toujours mobilisé. Ses adversaires n’hésiteront pas à lui reprocher son parti-pris. Mais l’ancien rapporteur spécial de l’ONU pour le droit à l’alimentation, actuel vice-président du comité consultatif du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, parle en connaissance de cause. Des informations historiques, des statistiques, des exemples concrets incontestables illustrent les explications du grand-père, qui fait preuve d’un grand talent pédagogique. Ses propos sont clairs, à la portée de ceux et celles qui, sans être des spécialistes des réalités socio-économiques, condamnent la dictature du marché.

En refermant ce petit livre, on se prend à rêver qu’il soit largement diffusé auprès de la génération de sa petite-fille, ces futurs artisans d’une société plus juste, même si, à la fin, l’auteur avoue son ignorance du système socio-économique qui devrait remplacer le capitalisme honni.

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