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mardi, 25 mai 2021 11:28

Maurice Zundel. Le passeur de gué

Geyler 1Bernard Geyler
Maurice Zundel. Le passeur de gué
Paris, Parole et Silence 2018, 220 p.

L’auteur, architecte qui sut remettre en état de nombreux édifices chrétiens, a rencontré Maurice Zundel à travers un de ses premiers livres, Croyez-vous en l’homme?, offert par Nicolas Jean Sed op, suivi d’un autre, Quel homme et quel Dieu? qui regroupe des exercices spirituels prêchés par le prêtre neuchâtelois au Vatican. Cette découverte donna envie à Bernard Geyler de comprendre plus profondément la spiritualité de Zundel, en entreprenant un master en théologie sous la conduite de la professeure Marie-Anne Vannier. Son livre nous rapporte la quintessence de son étude.

Il propose, en un premier temps, d’identifier les effets et les personnes qui ont éveillé la pensée du jeune Zundel. Tout d’abord sa grand-mère, qui vivait constamment en présence de Dieu. Elle l’emmenait régulièrement visiter les pauvres. À 10 ans déjà, Zundel savait que le mot «pauvreté» conduirait sa vie, mais aussi son regard sur Dieu. Puis Marie: à 15 ans, lors d’une prière à la Vierge dans l’église rouge de Neuchâtel, il ressent profondément qu’elle est vraiment une mère pour tous les hommes. La même année, grâce à un ami protestant, il découvre Le sermon sur la montagne, qui l’amène à établir définitivement un lien direct, de personne à Personne, avec Dieu, particulièrement à travers le texte des Béatitudes. Poursuivant des études secondaires à l’abbaye d’Einsiedeln, il découvre ensuite, avec émerveillement, la liturgie. Il sera moine dans son âme, en quête de silence, de prière et deviendra oblat bénédictin. Enfin, à partir de 1925 et jusqu’en 1946, Zundel est éloigné de son diocèse par décision de son évêque Mgr Besson. Cette traversée du désert, parfois douloureuse, lui donnera du temps pour se construire et fonder sa pastorale à venir.

Dans un deuxième temps, l’auteur décrit la théologie de Zundel. Celui-ci recommande une vie d’union à Dieu pour le connaître. Vivre en Dieu, s’émerveiller de Lui, pour adhérer silencieusement à la Présence, à ce Dieu Trine en lequel jaillit un échange d’amour incessant entre le Père et le Fils par l’action de l’Esprit saint. Sa pensée et son objectif s’inscrivent dans cette constante: il s’agit de développer la relation entre Dieu et l’Homme. Mais l’Homme doit naître à nouveau: c’est un des thèmes majeurs de toute sa prédication. La transmission de Dieu est liée à la transformation de l’homme. Qui pourrait prétendre transformer autrui au nom d’un Dieu qui ne le transformerait pas lui-même?

Concernant le problème spécifique du mal, Zundel dira: «J’enrage quand on me dit que Dieu permet le mal.» Pécher n’est pas un acte pour lequel nous serons punis, car le Christ ne sait que pardonner. Ce qui est beaucoup plus grave, c’est la souffrance que nous infligeons au Christ. Si Dieu existe, et qu’il est le créateur de la nature, il est donc aussi le créateur de cette aspiration vers le bien et de cette révolte contre le mal. Et qu’est-ce que le bien? «Il n’est pas quelque chose à faire, mais quelqu’un à aimer.» Son Dieu est le dieu de la pauvreté, du lavement des pieds.

Cette étude remarquable permet d’entrer avec bonheur dans le dynamisme de la pensée zundélienne, bien nécessaire pour notre temps.

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