L’analyse repose sur une double notion: celle de propriété et celle de frontière qui se conjuguent dans le pouvoir. Cette idéologie -qui d’ailleurs n’est pas spécialement capitaliste- se cache derrière le mérite, le statut héréditaire ou la qualité entrepreneuriale. On pourrait ajouter qu’elle sert également d’autojustification aux malchanceux affrontés à l’échec (qu’il s’agisse d’un concours administratif, d’une compétition sportive ou de la concurrence sur le marché, toutes les institutions marchent «à l’exclusion»).
Cette histoire n’ignore pas les succès (jugés insuffisants) de la social-démocratie ni les acquis du capitalisme; elle rend compte des dérives de la gauche intellectuelle (qualifiée de gauche brahmane), de l’enfermement nationaliste des pays libérés du colonisateur, et des inégalités extrêmes engendrées par les régimes communistes.
Pour sortir du piège, l’auteur propose un «socialisme participatif» orienté vers la «propriété sociale»: par la solidarité internationale sur la base d’un social-fédéralisme à l’échelle mondiale, par l’impôt fortement progressif tant sur le revenu que sur la propriété, par l’éducation, enfin par la transparence patrimoniale sur fond de distribution égalitaire de la propriété.
Qui refuserait un tel programme, aux relents toutefois quelque peu technocratique, et qui risque fort de se heurter à la dialectique entre les contraintes techniques, les impératifs sociopolitiques et les motivations individuelles? Car le fédéralisme -la Suisse en fait quotidiennement l’expérience- ne tombe pas du ciel. Capital et idéologie ne peut cependant que réjouir ceux qui, en quête de justice économique, restent sensibles -comme le rappelle la Doctrine sociale de l’Eglise- à la destination universelle des biens.