Né en 1932, le pasteur Éric Fuchs, théologien protestant genevois, directeur durant vingt ans du Centre protestant d’études où se débattaient dans une ambiance de grande liberté les questions existentielles autour du sens de la vie, du soin des malades en fin de vie, du mariage et de la sexualité, est aussi celui qui a marqué durablement la culture postchrétienne d’aujourd’hui. Sa thèse de doctorat Le désir et la tendresse relève d’une éthique exigeante qui conjugue les deux sens (objectif et subjectif) du «désir de l’autre», un désir qui ne cède rien aux envies arbitraires.
Chemin faisant, la biographe nous fait goûter l’ambiance, désormais perdue à Genève, de Plainpalais et du quartier des Acacias (alors semi-rural) de la première moitié du XXe siècle, ainsi que du Collège Calvin de la même époque, où le jeune Fuchs ressentit durement les premiers contacts avec la facture bourgeoise de ses condisciples.
À la lecture de ce petit livre, on comprend le plaisir d’Éric Fuchs à se confronter à l’œcuménisme, à créer et animer avec des jésuites et des dominicains de Genève l’Atelier œcuménique de théologie, tant il est vrai qu’il y a, selon lui, (mais il faudrait peut-être en parler au passé) deux morales chrétiennes, la catholique de l’obéissance et la protestante de la résistance.