Les éditions Albin Michel éditent alors son roman Batouala, dont la préface fustige la colonisation: «Civilisation, civilisation, orgueil des Européens, et leur charnier d’innocents […] Tu bâtis ton royaume sur des cadavres. Quoique tu veuilles, quoi que tu fasses, tu te meus dans le mensonge […] Tout ce que tu touches, tu le consumes…» Ces propos ont provoqué un véritable scandale, ce qui n’a pas empêché leur auteur de recevoir le prix Goncourt en 1921. René Maran rentre en France en 1923 où il poursuivra une carrière d’écrivain, de journaliste littéraire et radiophonique à Paris.
Son roman est né d’une observation ethnologique d’un village africain, en Oubangui-Chari, une région riche en caoutchouc et très peuplée. Dans un langage succulent, il décrit les mœurs et coutumes locales d’un village et de son chef Batouala. On vibre dans la brousse avec les animaux et ses habitants. Ernest Hemingway écrira à ce sujet: «On hume les odeurs du village, on en partage les repas, on voit l’homme blanc tel que l’homme noir le voit, et après y avoir vécu, on y trouve la mort.» On assiste aussi aux fêtes, aux rites, à la chasse … jusqu’à la disparition totale du village et de ses habitants.
Liberté de penser et d’être … à savourer au moment où le prix Goncourt 2021 a été attribué à un Africain, Mohamed Mbougar Saar, pour son livre La secrète mémoire des hommes (coédition Philippe Rey et Jimsaan).