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mercredi, 26 septembre 2018 14:57

Bajo el signo de Tespis

Bajo el signo estreno"Bajo el signo estreno" © Paulina ChávezSelon Wikipédia, «Thespis d’Icare est considéré comme l’inventeur de la tragédie grecque». Et c’est bien de cela qu’il s’agit avec Bajo el signo de Tespis (Sous le signe de Thespis): un multidrame familial joué par un acteur principal, accompagné d’un chœur qui «chante et danse en relation avec l’action» (toujours selon Wikipédia).

Bajo el signo de Tespis a pour cadre le Mexique et son contexte sociopolitique peu réjouissant. Son auteur, José Manuel Hidalgo, lui-même mexicain, a remporté avec ce texte le prestigieux Prix national de dramaturgie Manuel Herrera. Âgé de 22 ans, il aborde avec humour et naïveté la réalité de cette violence urbaine, décrite comme «systémique» par Aurora Cano, co-directrice de DramaFest, un festival biennal mexicain.

Le concept de DramaFest est d’inviter, à chaque édition, un pays différent pour un échange de bon procédé: un texte mexicain est monté par un metteur en scène d’un autre pays, et vice-versa. C’est dans ce cadre que Bajo el signo de Tespis a été joué en ouverture de saison d’un théâtre genevois, le POCHE/GVE, du 26 au 29 septembre. Et c’est Mathieu Bertholet, directeur du POCHE depuis 2015, qui s’est attelé à la tâche de la mise en scène.

Sous le signe de Thespis
Texte: José Manuel Hidalgo
Traduction: Julie Gilbert
Mise en scène: Mathieu Bertholet

Bajo el signo de Tespis est le monologue d’une jeune fille dont le père a été tué sous ses yeux, alors qu’il retirait de l’argent au bancomat. Sa mère, ayant fait son deuil plutôt rapidement, invite son amant à vivre avec elles. Un choix judicieux puisqu’elle apprend très vite qu’elle est enceinte de trois mois, de l’amant bien sûr. La jeune fille se retrouve ainsi rapidement flanquée d’une petite sœur qu’elle déteste, mais qu’elle se voit contrainte d’emmener avec elle quand sa mère les met à la porte, le beau-père ayant lui aussi été tué en retirant de l’argent au bancomat…

Le scénario paraît un peu tiré par les cheveux (on a même droit à une troisième scène d’attaque armée au bancomat), mais c’est en fait l’histoire simple d’une jeune mexicaine lambda. Environnée par la violence qui touche son pays et sa population, elle raconte, comme toute adolescente américaine un peu rebelle le ferait, la succession de ses problèmes personnels. Le contexte restant à sa place … de contexte.

Les deux autres acteurs jouent plusieurs rôles à la fois: la mère, le père mourant, le beau-père, le beau-père mourant, la sœur, le petit ami douteux, etc. Mais ils constituent, aussi et surtout, le chœur, au sens où on l’entend dans la tragédie grecque, jouant les émotions et réagissant au récit avec brio.

La pièce se clôt sur une note dégoulinante d’espoir, une fin heureuse qui fera sourire sarcastiquement le spectateur, avant de lui faire réaliser le coup de génie de ce jeune auteur mexicain: faire croire à la représentation d’un simple mélodrame familial humoristique, alors que le vrai sujet est la violence sociale actuelle de son pays.


Le deuxième acte de ce dialogue interculturel est à voir au POCHE/GE du 26 au 28 septembre. El funesto destino de Karl Klotz (Le destin tragique de Karl Klotz) est un texte écrit par l’auteur suisse Lukas Linder. Il est monté ici par Damián Cervante, un metteur en scène mexicain. Les deux pièces sont liées par leur thème, à savoir un drame familial, dans un contexte de violence (physique, au Mexique, et psychologique, en Suisse).

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