Mohamed est ingénieur en électronique. Ce sont ses proches, si fiers de lui, qui l’ont convaincu d’embarquer, avec 600 autres personnes, sur un bateau de fortune pour Lampedusa. Il s’est préparé pour ce voyage, il a appris à nager, pris avec lui de quoi être présentable lorsqu’il rencontrera ces Européens et leur demandera l’asile. Seulement Mohamed ignore que ce n’est pas à la peur du naufrage en mer qu’il fallait se préparer, mais à celle de gravir la montagne.
Les pensées de Mohamed vont naviguer entre cette vision naïve des Européens qu’il avait en Afrique et celle, ironique, qu’il a à présent. Il fuit ce «circuit de la bienfaisance» dans lequel il avait mis tant d’espoir. Il parle de «la Nation», l’Afrique, qu’il ne doit pas décevoir, face à «l’Empire», l’Europe, où il doit faire ses preuves. Il délire, parfois, imaginant la vie qu’a pu avoir l’homme blanc qui a porté son sweat-shirt avant lui, comparant et jugeant leurs forces de caractère respectives.
Lampedusa Snow nous fait réaliser que, aujourd’hui, les obstacles que les exilés rencontrent sur leur parcours sont d’ordres physiques, mais aussi psychologiques. Les murs infranchissables que représentent les Alpes vont de pair avec les hommes qui refusent le contact avec les exilés.
«Notre responsabilité n’est pas de trouver des solutions aux problèmes des réfugiés, notre responsabilité réside dans la dénonciation des souffrances infligées par des sociétés dites “civilisées” à nos frères humains», rappelle Simone Audemars, metteure en scène de Lampedusa Snow.
Cette pièce a été jouée précédemment au Théâtre de La Grange de Dorigny, à Lausanne, du 1er au 3 décembre 2016.
Mathilde Pelleti