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mercredi, 06 juin 2012 12:00

Ecospiritualité

Michel Maxime Egger, La Terre comme soi-même, Repères pour une écospiritualité, Genève, Labor et Fides 2012, 322 p.

Crise écologique, perte de sens, démagogie, fatalisme, ignorance, peurs? notre monde doit répondre aux défis soulevés par la destruction de la planète. Nos gestes quotidiens, comme les grands rassemblements qui tirent la sonnette d'alarme, ne suffiront pas sans changement de paradigme, « car les racines de la crise écologique sont en réalité spirituelles ».

« La crise écologique ne questionne pas seulement ce que nous faisons, elle interroge aussi ce que nous sommes. » Michel Maxime Egger, enraciné dans l'orthodoxie et engagé dans le développement durable, vient réveiller nos consciences engluées dans des schémas de pensée étriqués et déformés par notre éducation théologique. La crise écologique touche non seulement un système économique à bout de souffle, mais « les fondements mêmes de la civilisation occidentale : une conception dualiste et désacralisée du cosmos et de l'être humain ».

L'auteur appelle le christianisme à « effectuer une évolution critique des forces et faiblesse de sa théologie à travers les siècles ». Le christianisme, trop centré sur l'homme, « a coupé le cordon ombilical avec la terre-mère et souligné sa liberté transcendante par rapport aux lois du cosmos ». En adoptant des postures fondamentales ambiguës envers la nature (dévalorisation et instrumentalisation d'un côté, célébration de l'autre), il a perdu la tradition des Pères de l'Eglise. Ceux-ci invitaient au contraire à penser la nature comme infiniment digne de respect, car à la fois contenue en Dieu et habitée par le divin, promise à la transfiguration finale en Dieu au même titre que les êtres humains et les anges.

Il faudrait restituer la dimension de mystère du cosmos (la nature est en Dieu et Dieu est dans la nature) et retrouver l'unité du cosmique, de l'humain et du divin. L'auteur analyse la création ex nihilo du monde par Dieu, du néant à l'être, et repense la place de l'être humain comme médiateur, roi de la création, intendant et liturge (eucharistie).

« L'écospiritualité ne trouve sa plénitude de sens que si notre transformation s'incarne dans des engagements concrets, quotidiens et politiques », dans toutes les dimensions de notre existence.

En revisitant la tradition chrétienne, orthodoxe en particulier, Michel Maxime Egger tente donc de définir une écospiritualité pour notre temps : ses fondements théologiques, anthropologiques et cosmologiques, mais aussi son ethos. Il répond avec profondeur aux questionnements de nombre de nos contemporains. Ce qui pourrait redonner vie à nos célébrations dans une perspective d'ouverture, de communion universelle et cosmique, afin de sortir de nos exclusions et de nos particularismes.

Espérons que ce livre sera lu et étudié largement? pour le salut de chacun et de notre planète, unis en Dieu au cosmos.

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