Une longue histoire d’amour relie Élisabeth Beck et les ruines de l’abbaye de Hambye, achetées par son mari en 1956. Cette abbaye bénédictine, dans la Manche, au sud de Coutances (Normandie), a été fondée en 1145. Émue par sa beauté, par son caractère poétique et son histoire, l’enseignante d’Aix-en-Province et auteure de recueils de poèmes Claudine Mussawir emmène le lecteur à sa découverte.Le nom de Hambye est d’origine nordique mais son étymologie demeure obscure (Ham, forteresse, château et Bü, domaine?). Ni château ni forteresse, seulement une rivière, la Sienne… En 1750, il ne restait dans l’abbaye que deux moines et deux desservants. L’abbaye suit les règles de saint Benoît de Nurcie (VIe s.), qui «fixe l’organisation de la vie monastique et oriente la vie spirituelle des moines, entre Ora et Labora». C’est l’époque où les cisterciens se démarquent de Cluny et viennent rappeler l’idéal de rigueur et de pauvreté.
Des ruines, une immense église à ciel ouvert… L’histoire du sauvetage du site commence en 1956, lorsque le mari d’Élisabeth Beck achète les bâtiments conventuels de l’abbaye. Débute alors un long combat contre le chaos qui y règne (une ferme occupe une partie des bâtiments et les animaux pâturent à l’intérieur de l’église). «Il fallait se battre pour rendre à l’abbaye sa dignité et sa beauté.»
C’est l’histoire de cette mission que raconte l’auteure de ce livre: la ténacité, l’énergie incroyable d’Élisabeth Beck qui a ressuscité ce lieu «d’ombres et de lumière», ce lieu de beauté et de silence. Mais Claudine Mussawir ne se contente pas de rapporter le sauvetage des ruines; au fur et à mesure de l’évocation de la reconstruction, elle rejoint la vie des moines, comme si l’abbaye était encore habitée, comme si elle vivait encore et que des chants grégoriens s’élevaient vers le ciel. La bibliographie révèle aussi ses recherches historiques.
Ce livre touche au cœur. Il est jeu de lumière, de prière, de silence, de dur labeur de reconstruction et voyage poétique… Des citations des Psaumes, de Péguy, de Claudel, de Teilhard de Chardin sj… résonnent en harmoniques qui vibrent dans le silence de l’abbaye.
«J’étais venue prendre des photos. Pour tenter -en vain- de capter, de graver la beauté de cette abbaye, la paix qui l’habite. De saisir l’insaisissable. Il est des lieux qui nous taraudent. Dont la présence nous pénètre. Comme une musique. Il y a eu un avant et un après. Et nous, plus tout à fait les mêmes…»
Claudine Mussawir
Abbaye de Hambye d’ombres et de lumière
Bayeux, OREP éditions 2021, 150 p.