jeudi, 03 mars 2016 15:53

Pas de souci !

Écrit par

« Pas de souci ! » Cette expression, familière et rassurante, fait partie du vocabulaire de bon nombre d’entre nous. Elle court dans les magasins, sur les quais de gare, dans les cliniques, les banques, et même à la maison. Les lecteurs de ce numéro de choisir, au travers des réflexions qui sont proposées sur le travail à l’heure du numérique[1] et sur le « transhumanisme »,[2] vont se réjouir ou s’inquiéter en découvrant ce que les scientifiques nous préparent dans l’ombre. Des recherches dans l’univers médical et technique se développent rapidement. Une logique rigoureuse, notamment dans une perspective thérapeutique, vise à créer des humains toujours plus performants. Ainsi se mijote dans les laboratoires, avec discrétion et efficacité, une forme d’humanité nouvelle. Ainsi certaines avancées technologiques étonnantes nous libèreront à coup sûr des tracas quotidiens et seront accueillies avec bonheur.

Michel Salamolard 
En finir avec le « péché originel » ?
Paris, Editions jésuites/ Fidélité 2015, 288 p.

Un beau livre utile. Et j’insiste sur l’utilité, car il permet à un non spécialiste de s’orienter dans une problématique qui remonte à saint Augustin, qui comporte la difficile question des enfants non baptisés, c'est-à-dire qui porte aussi sur des croyances et des rites ancrés dans une tradition simplement transmise. Des questions qui finalement touchent à une interrogation séculaire : qu’est-ce que le mal, pourquoi y a-t-il du mal ? ; et avec saint Anselme : cur deus homo ?, pourquoi fallut-il un sauveur ?
Un coup de maître d’abord : une manière sûre et intelligente de séparer ce que la foi catholique a retenu de saint Augustin à ce sujet, et ce qui reste du registre de l’opinion personnelle. D’utiles précisions sur la notion de « dogme » sont à retenir à cette occasion.

jeudi, 03 mars 2016 15:48

Abus sexuels

Karlijn Demasure (dir.) 
Se relever après l’abus sexuel 
Accompagnement psycho-spirituel des survivants 
Bruxelles, Lumen Vitae 2014, 104 p.

L’objectif de cette collection d’articles est double : «aider activement les victimes à se reconstruire par la rencontre de l’autre» et mettre en route des personnes qui vont «activement à la recherche de l’autre pour l’inviter à rompre le silence».
Cet ouvrage donne des clés aux thérapeutes et aux accompagnants spirituels pour leur permettre de rouvrir aux survivants les portes de la société. Le mot survivant est intentionnellement utilisé pour souligner que les victimes ont une possibilité de vivre au-delà de l’abus, en intégrant la réalité de celui-ci de telle façon qu’elle ne mortifie plus l’abusé.

jeudi, 03 mars 2016 15:46

Chute et résurrection

Timothy Radcliffe 
Chemin de croix 
Paris, Cerf 2015, 132 p.

L’auteur, dominicain, a été maître de l’ordre des prêcheurs de 1992 à 2001 et s’est fait connaître internationalement par ses analyses et ses prises de position courageuses et libres, ouvertes sur la société contemporaine et enracinées dans la tradition.
La première station de son chemin de croix commence par une phrase cinglante : « Le procès de Jésus est une farce ! Pilate ne le croit pas coupable... Est-il un cynique las, qui n’a rien à faire de la vérité ? A-t-il peur des accusateurs ? » De là, l’auteur pose son regard sur notre monde où tant de gens subissent l’exécution pour des raisons semblables ! Les Noirs pauvres des Etats-Unis sont souvent condamnés à mort sans être réellement défendus par leurs avocats, qui semblent se désintéresser de leur cas. Et nous ? N’agissons-nous pas souvent ainsi, condamnant des gens sans prêter attention à ce qu’ils pensent et font réellement ?

Marius Borgeaud (1861-1924)
Fondation de l’Hermitage, Lausanne,
jusqu’au 25 octobre

L’Hermitage célèbre Marius Borgeaud au travers d’une vaste rétrospective, sans rancune pour celui qui avait préféré la France à sa Suisse natale. Oui, des Suisses aiment la France ! Né à Lausanne en 1861, Marius Borgeaud a bien dû être un de ceux-là pour s’y installer en 1890 et mourir rue Lamarck, à Montmartre, trente-quatre ans plus tard. Son pays d’adoption le lui a bien mal rendu, en s’empressant de l’oublier. A l’inverse, son œuvre suscite la passion des collectionneurs helvètes.

56e Biennale de Venise,
jusqu’au 22 novembre 2015

Pavillon des immigrants apatrides anonymes. Accompagnée d’une flèche, l’inscription est portée au pochoir sur le dernier pont qui enjambe le canal avant l’Arsenal, l’un des deux lieux qui constituent l’ossature de la Biennale de Venise. Elle ne se réclame pas de l’art des rues. Elle est un acte politique. Le curateur de la Biennale Okwui Enwezor, Américain d’origine nigériane, l’a voulu ainsi. Dans un auditoire aménagé au cœur du pavillon central des Giardini, lecture du Capital de Karl Marx.

mercredi, 02 mars 2016 15:31

A hauteur d'homme

Les nuits blanches du facteur,
d’Andreï Konchalovski
La Isla Minima,
d’Alberto Rodríguez

Quand à 77 ans, après une parenthèse hollywoodienne dans le genre film d’action[1], un réalisateur russe ayant débuté avec Tarkovski[2] revient à ses premières amours[3] - une forme mêlant documentaire et fiction -, cela donne Les nuits blanches du facteur, un film magnifique d’Andreï Konchalovski.

mercredi, 02 mars 2016 15:28

Une Suisse vacillante

Cet automne, les Suisses éliront un nouveau Parlement fédéral. S’ensuivra le renouvellement du Conseil fédéral. Les enjeux sont importants; le cours de la politique suisse de ces prochaines années dépend de ces élections. De quoi rappeler aux abstentionnistes leur responsabilité. Décryptage.[1]

«Quoi - des élections en Suisse ? De toute façon, il ne se passe rien chez vous!» Notre pays a une telle réputation de stabilité et de tranquillité, que les étrangers sont parfois étonnés d’apprendre que chez nous aussi, on organise des élections de temps en temps, et que ces élections ont tout de même leur importance. Ces propos relèvent bien sûr d’une vision caricaturale de notre pays, mais s’il est vrai, comme l’a écrit Denis de Rougemont, que «les peuples heureux n’ont pas d’Histoire», il faut reconnaître que la Suisse a et fait peu d’histoire(s). Et que la politique suisse n’est pas propre à soulever les passions.

mardi, 01 mars 2016 17:41

Des jésuites ouvriers

Écrit par

Soutenus par le Père général Jean-Baptiste Janssens, des jésuites français se lancèrent en 1944 dans l’aventure des prêtres-ouvriers. Une histoire admirable de générosité, marquée par de grandes souffrances et des crises, où la nouveauté et la créativité entrèrent en conflit avec l’obéissance. Le Père Noël Barré retrace cette entreprise dans un livre récent, basé sur son propre vécu et une mine d’archives.

Les jésuites ont la réputation d’être plus proches des élites bourgeoises et des intellectuels que du monde ouvrier. Il est vrai que la Compagnie de Jésus a parfois soigné cette image en exhibant de préférence ses chevaux de parades : les confesseurs des rois, les savants, les grands prédicateurs, les apôtres au long cours, tant de personnalités hors du commun. Et pourtant... Ignace de Loyola s’était mis au service des plus démunis et des exclus, et ses initiatives en faveur des pauvres, des malades, des femmes en détresse, des prostituées constituèrent une part importante de l’engagement des premiers jésuites. De ses compagnons envoyés au concile de Trente en qualité de théologiens du pape, il exigea qu’ils aillent loger à l’hospice, parmi les pauvres, et qu’ils consacrent une partie de leur temps aux démunis et aux enfants.[1]

Suite à son engagement dans la fermeture de la fonderie métallurgique de Doe Run, à La Oroya, Mgr Pedro Barreto, membre du Conseil pontifical Justice et Paix du Vatican, est devenu l’un des défenseurs des droits socio-environnementaux les plus reconnus au Pérou.[1] Il partage avec choisir les racines évangéliques de sa motivation.

Véronique Lecaros et Rolando Pérez : Mgr Barreto, qu’est-ce qui vous a amené à vous impliquer dans la lutte contre la pollution de La Oroya ?