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vendredi, 12 octobre 2018 17:00

Franz Stock

StockLe 14 juillet 2018, l’Abbé Willy Vogelsanger décédait. Grand lecteur, il a écris durant des années des recensions d’ouvrages pour notre rédaction. Il affectionnait en particulier les témoignages ou biographies de personnalités engagées pour le bien de la collectivité et le service de la foi. Le Père Franz Stock, décédé il y a 50 ans, était l’une de ces figures inspirantes. Voici la dernière recension envoyée à choisir par l’Abbé Vogelsanger. Merci encore cher Willy.

Franz Stock
Journal de Guerre. Écrits inédits de l’aumônier du Mont Valérien
Paris, Cerf 2017, 448 p.

Impressionnante et émouvante, une telle existence donnée à Dieu et aux autres dans un contexte de vie humainement tragique! Le livre de Raymond Loonbeeck, (Salvator, 2007) avait décrit le parcours étonnant de ce prê­tre allemand, francophile nommé à la paroisse allemande à Paris, avant la gue­rre, puis à nouveau lors de l’occupation et désigné aumônier des prisons de Pa­ris. Son journal tenu du 27 janvier 1942 au 26 avril 1947, en 290 pages, laisse entrevoir une âme de feu, un quotidien en lien avec Dieu et au service de chacun: entretiens, bap­têmes, communions, confessions, accompagnement des condamnés à mort, célébrations de messes, parfois plusieurs le dimanche, conférences sur Jésus ou sur l’Église, connaissance parfaite du français au point d’écrire un livre sur la Bretagne, organisateur de promenades, artiste, créateur du «séminaire des barbelés»... bref un homme de Dieu sur tous les fronts où des gens avaient be­soin de lui… le tout vécu dans la simplicité et la discrétion.

Prêtre de la paroisse allemande, il gardait sa soutane quand il visitait les pri­sonniers. Il agissait avec tact et avec le souci de demeurer attentif aux prescrip­tions des chefs allemands de l’Occupation de Paris.

Son discours d’adieu prononcé à l’occasion de la fermeture du «séminaire des barbelés» à Chartres, le 16 avril 1947, a émerveillé chacun par la lucidité et l’objectivité concernant la situation de l’Église. S’adressant aux séminaristes dont il prend congé, il énumère les orientations de l’Église après avoir décrit les obstacles. «Un monde nouveau est né, et vous allez être effrayés... Lorsqu’une crise économi­que et sociale ébranle le monde, les institutions et la vie de l’Église ne sont pas épargnées... Plus la crise est profonde, plus elle bouleverse les valeurs fonda­mentales de l’existence humaine, plus elle secoue le corps de l’Église... L’Église peut endosser le rôle qu’elle a joué au seuil du grand Moyen Âge: messagère du surnaturel, elle peut sauver la nature, mandataire de Dieu, elle peut libérer les hommes... Le temps des grandes persécutions, où les chrétiens sont décla­rés ennemis de l’humanité, peut resurgir... Dans un monde paganisé, l’Église redevient missionnaire... Mais la mission ne se limite pas à des méthodes, mais s’exprime par l’esprit qui doit pénétrer l’ensemble du clergé et des fidèles... Notre époque est activiste, fébrile, érotique, confond le spirituel et le temporel. Notre époque assiste à la victoire de la haine, est anachronique, révolutionnaire et ac­cumule catastrophes et ruines dans les villes comme dans les âmes... Il importe d’être le fils de son temps, de réconcilier l’Église et le monde moderne. Le nom­bre de saints voulus par Dieu suffit à sauver une époque...»

Décédé un an après ce discours, à 44 ans, Franz Stock a profondément marqué les personnes rencontrées et laisse un témoignage bouleversant. Le nonce apostolique Roncalli, futur Jean XXIII, a présidé ses obsèques. Deux as­sociations, des deux côtés du Rhin, Franz Stock Romine et Les Amis de Franz Stock entretiennent le rayonnement de ce prêtre. Il est même question que «l’examen de sa cause de béatification soit en cours à Rome».

En fermant ce livre, le lecteur se dit: «Il fait bon de côtoyer de tels personna­ges.»

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