«Chacun son chemin.» La formule coupe immédiatement court à tout discours critique sur le pèlerinage de Compostelle. Il faut néanmoins le reconnaître: la marche vers Saint-Jacques n’a plus grand-chose de chrétien. Yvan Mudry relate ici ses réflexions à l’emporte-pièce, celles d’un «pèlerin» qui a cheminé avec ravissement, d’avril à juin 2015, du Puy-en-Velay à la cité de l’apôtre.
Il est un chemin plus que confidentiel que Compostelle, moins touristique que spirituel et qui, du début à la fin, ne quitte pas les terres hispaniques. Il a été emprunté au XVIe siècle par le fondateur de l’Ordre des jésuites. Le pape François en a fait, pour un an, un haut lieu de pèlerinage. Bienvenu sur le « Camino ignaciano » !
Chères lectrices, chers lecteurs,
Voilà l’été, et avec la saison des voyages, nous nous transformons en étrangers au-delà de nos frontières et faisons de nouvelles expériences. La vraie tolérance implique le respect de la spécificité de l’autre. Et seule la compréhension mutuelle permet d’agir ensemble, pour atteindre des objectifs communs. Ces valeurs sont également les éléments clés de la Mission. En définissant celle-ci comme une «théorie et pratique de la rencontre ecclésiale avec l’autre» (Christine Lienemann-Perrin), on lui confère une importance capitale. En effet, interprétée ainsi, la Mission incarne, dans notre monde globalisé, des valeurs résolument contemporaines. Mais ce n’est pas qu’en vacances que nous rencontrons des étrangers, nous le faisons également ici, quotidiennement. Le défi consiste à bâtir ensemble un monde qui ait du sens pour tous.
Sur le plan théorique, nous avons nos valeurs chrétiennes. Dans la pratique, nous devons faire appel aux expériences faites avec les étrangers. Que ce soit en tant que spectateur d’une performance du «jésuite dansant», le Père Saju, dans une église baroque suisse, ou en accomplissant son service civil en Indonésie : l’expérience faite avec l’autre change notre propre vision du monde. Après leur retour de l’étranger, on observe ainsi chez ceux qui ont accompli leur service civil, ou chez les volontaires, la volonté de s’engager ici, au sein de la société et de l’Eglise. Nous-mêmes faisons de précieuses expériences via le dialogue avec nos partenaires de projets. Elles sont utiles à la poursuite de notre collaboration et nous aident à offrir aux populations locales un meilleur avenir. Nous sommes intimement convaincus que l’éducation permet non seulement aux individus de s’épanouir, mais les prépare également à prendre des responsabilités dans leur entourage privé ainsi que dans la société. Nous vous remercions pour le soutien que vous apportez à de nombreux projets qui, bien que paraissant souvent insignifiants, n’en demeurent pas moins très efficaces.
Père Toni Kurmann sj
Procure des missions
Lire le supplément ci-dessous :
Figure rayonnante de l’orthodoxie moderne, le Père Men a tenté de donner à l’Eglise russe un nouveau souffle, en l’invitant à sortir des limites induites par ses liens avec l’Etat et à s’ouvrir à l’œcuménisme. Il l’a payé de sa vie. Pour comprendre sa tragique trajectoire, il faut la replacer dans son contexte.
Le dernier mensuel de la revue culturelle choisir, avec son dossier sur le jardin, où la vie se déploie, puis s’endort, avant de repartir de plus belle, est une belle allégorie du tournant qui est le nôtre! Depuis 1959, année de sa création par les jésuites de Suisse romande, la revue choisir a été éditée 680 fois. Autant de belles récoltes ! Elle se prépare à une petite pause, le temps d’un été, pour mieux redémarrer dès l’automne, à un autre rythme et sous d’autres formes. Choisir, en effet, devient un trimestriel.
Thinking Faith, la revue en ligne des jésuites anglais, propose une lecture du Brexit à la lumière de la spiritualité ignacienne. «Il ne fait aucun doute que le résultat est un choc», écrit Frances Murphy, rédactrice en chef. Dans son article – Brexit : where to from here? - elle suggère aux Britanniques qui ont décidé de quitter l'Union européenne, de suivre une route «pavée de générosité» qui mène au bien commun. «Le défi à long terme pour les décideurs du Royaume-Uni et de l'UE doit être guidé par le principe de solidarité, qui vise à façonner une société qui ne se préoccupe pas seulement de son intérêt propre mais du bien-être de tous celles et ceux qui vivent à l'intérieur et à l'extérieur de leurs frontières.»
A lire en anglais sur le site de Thinking Faith. www.thinkingfaith.org/articles/brexit-where-here
«La plupart des économistes prédisent un manque à gagner, voire un ralentissement de la croissance britannique dans le cas où le Brexit serait mis en œuvre», commentait le jour du vote l’économiste jésuite Etienne Perrot dans nos colonnes. En cas de sortie de l’UE, poursuivait-il, « la Grande-Bretagne ne pourrait plus servir de tête de pont aux entreprises multinationales dans leur stratégie de pénétration des marchés européens, les accords de libre-échange seraient moins favorables, la place financière de Londres serait affectée. » Un article à relire ici.
On le sait depuis peu : on ne se contentera plus de faire « mémoire » au calendrier romain de sainte Marie-Madeleine, mais la liturgie fêtera les 22 juillet Marie de Magdala, comme elle le fait pour la Vierge Marie et pour les apôtres. C’est plus qu’un simple remaquillage d’une sainte trop souvent représentée comme le modèle de la pécheresse à la suite d’une bourde exégétique magistrale du pape Grégoire le Grand (en 591). C’est lui qui conduisit l’Eglise de Rome à faire de toutes les « Marie » (à l’exception de la Vierge) une seule et même femme, et à faire porter à cette « pécheresse » anonyme le nom de Marie de Magdala. L’Eglise orthodoxe, par contre, a toujours fait la distinction entre les différentes Marie.
choisir revue culturelle
On le sait depuis peu : on ne se contentera plus de faire « mémoire » au calendrier romain de sainte Marie-Madeleine, mais la liturgie fêtera les 22 juillet Marie de Magdala, comme elle le fait pour la Vierge Marie et pour les apôtres. C’est plus qu’un simple remaquillage d’une sainte trop souvent représentée comme le modèle de la pécheresse à la suite d’une bourde exégétique magistrale du pape Grégoire le Grand (en 591). C’est lui qui conduisit l’Eglise de Rome à faire de toutes les « Marie » (à l’exception de la Vierge) une seule et même femme, et à faire porter à cette « pécheresse » anonyme le nom de Marie de Magdala. L’Eglise orthodoxe, par contre, a toujours fait la distinction entre les différentes Marie.
Jacqueline Kelen
Sois comme un Roi dans ton cœur
Genève, Labor et Fides 2015,164 p.
Interviewée par la journaliste Anne Ducrocq (La Vie, Le monde des religions...), Jacqueline Kelen, ancienne productrice de France Culture qui a déjà publié plus de trente livres consacrés aux grands mythes et aux figures mystiques, dit d’emblée que la vie privée ressemble à un jardin : il n’est pas interdit d’y entrer mais ce n’est pas un espace public que tous peuvent fouler. Nous voilà avertis, son jardin intime restera secret... car l’intériorité « c’est avant tout l’histoire entre Dieu et mon âme ». Une histoire qui tantôt ressemble aux plaintes de Job ou aux lamentations de Jérémie, tantôt prend le cours du Cantique des Cantiques.
Dès l’enfance, Jacqueline Kelen a le sentiment de venir de très loin, comme si elle avait déjà vécu des siècles. La nostalgie, dit-elle, ce n’est pas une vague tristesse ni le regret d’un passé révolu, mais le mal du retour vers son véritable royaume. Parlant de culture, qu’elle qualifie d’essentielle, elle dit qu’elle ne repose pas sur une accumulation de spectacles, de concerts, de visites de musées, mais sur une curiosité personnelle, la soif de découvrir, de rencontrer, d’être surpris et dépaysé. Et les pages se suivent, toutes plus belles les unes que les autres. La langue orale de l’interviewée est aussi légère, délicate, élégante, pleine de poésie que celle écrite à laquelle elle nous a habitués.
Ce qui la frappe en observant ses contemporains, c’est qu’ils sont de plus en plus encombrés, et de citer un proverbe yiddish : « Un linceul n’a pas de poches ! » Elle parle de son enfance, de ses études, de son travail à France Culture, de sa soif d’écrire. Sa curiosité à l’endroit des religions et des spiritualités du monde entier est inapaisée et elle cherche le fil d’or caché qui relie toutes les voies authentiquement spirituelles. La religion, dit-elle, relie, le spirituel délie et la mystique unifie.
Mais loin d’elle l’idée d’exercer une maternité spirituelle. Si « mon existence porte des fruits spirituels, Dieu seul en est témoin ». Elle espère simplement donner envie à chacun de s’aventurer dans l’amour et la connaissance, en stimulant la curiosité, le courage de réfléchir et d’approfondir. Parfois, elle se demande si elle est dans la ligne enseignée par l’Eglise ou si elle est gnostique ! En tous cas, elle s’en prend aux faux gourous, aux marchands de bien-être qui exploitent la confiance des gens. La religion n’a pas pour but d’aider ou de faire du bien, mais de révéler la Vérité. Et de citer Socrate : « Vous pouvez tuer mon corps, vous ne pouvez pas nuire à mon âme. » Elle avoue que si elle parle et écrit, c’est pour réveiller les consciences et les ranimer, pour rappeler la Transcendance.
Dans un dernier chapitre où il est question de sainteté, elle redit l’ordre pressant de Jésus : « Viens et suis moi. »