lundi, 19 novembre 2012 15:24

Une promesse à tenir

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Le 8 octobre dernier, les jésuites de Suisse se sont réunis à Zurich à l’occasion du 50e anniversaire de l’ouverture du concile Vatican II. Pour les plus anciens, comme pour les plus jeunes pour qui l’assemblée conciliaire relève d’un lointain passé, il ne s’agissait pas de commémorer un événement du XXe siècle, mais d’entrer à nouveau dans un processus d’apprentissage et de réforme.

De l’exposé du professeur Roman A. Siebenrock, laïc et père de famille, enseignant à la Faculté catholique de théologie d’Innsbruck, je retiens que les textes substantiels du Concile méritent d’être lus ou relus car ils demeurent actuels. Il importe de les faire connaître comme sources d’orientation et de renouvellement, comme indicateurs de changements encore à réaliser, en particulier les deux textes fondamentaux : la Constitution dogmatique sur l’Eglise et la Cons­titution pastorale sur l’Eglise dans le monde de ce temps (c’est-à-dire « en étroite solidarité avec l’ensemble de la famille humaine »). C’est l’occasion de réentendre la Déclaration, alors très nouvelle en 1965, sur la liberté religieuse et le droit des personnes et des communautés à l’exercer. De relire aussi le Décret sur l’œcuménisme, sur l’existence des Eglises et Communautés sœurs et sur le bien-fondé du mouvement vers l’unité visible inspiré par l’Esprit de Dieu. Enfin, et peut-être surtout aujourd’hui, de redécouvrir la Déclaration sur les relations avec les religions non-chrétiennes, notamment hindoue, bouddhiste, musulmane et juive, pour reconnaître positivement « ce que les hommes ont en commun et qui les pousse à vivre ensemble leur destinée ».

A Vatican II, premier concile indépendant de l’Etat dans l’Histoire, depuis celui de Nicée qui avait été convoqué en 325 par l’empereur Constantin, les évêques avec le pape se sont engagés par une promesse à suivre la voie tracée par les documents qu’ils avaient approuvés à une écrasante majorité. Promesse tenue ? Dans un contexte mondial certes très différent des années 60, où la présence des populations et des Eglises de l’Est européen et des continents asiatique, africain et américain du Sud est beaucoup plus forte, la promesse des Pères du Concile n’est pas caduque. Elle demeure.

Les jeunes sont ouverts et veulent découvrir Dieu et le Christ. Ils ne comprennent pas les débats entre progressistes et conservateurs, débats qui leur paraissent stériles et d’un autre âge. Pour les jeunes générations et les nôtres qui se sont renouvelées, l’identification chrétienne, comme à l’époque du christianisme naissant des deux premiers siècles, prend la forme d’une adhésion personnelle au Christ. Elles cherchent également des assemblées chrétiennes d’accès facile pour les gens ordinaires et les « chrétiens du seuil ». Que ce soit dans une paroisse traditionnelle, dans une église de maison où on se réunit entre amis et proches ou encore dans quelque grand rassemblement - comme ceux de Taizé ou des Journées mondiales de la jeunesse -, elles désirent un lieu ouvert, où l’accueil est pratiqué, où existent des réseaux d’entraide et d’assistance.

Or l’anthropologie chrétienne, qui remonte en particulier à l’apôtre saint Paul, donne une dimension universelle à la solidarité entre les hommes et les femmes soucieux du bien commun, qu’ils reconnaissent l’autorité ou la contestent parfois. Si cela signifie aujourd’hui la fin d’une religion de la « tribu », qu’elle soit catholique ou tout simplement chrétienne, cela ne s’accompagne pas du tout de l’abandon des liens d’appartenance entre croyants issus de différentes régions du monde, ni d’une forme de solidarité ouverte.

Une amie, souvent critique à l’égard des autorités romaines, m’a rappelé le voyage récent de Benoît XVI au Liban et les places réservées aux chiites (et non pas seulement aux sunnites) sur le lieu du rassemblement. Comme elle me l’a écrit, elle a été frappée « surtout par l’expression du visage de ce pape qui a souffert ces dernières années en constatant bien des errances au Vatican comme ailleurs. Un visage de bonté et d’ouverture aux autres [dans ce contexte, aux musulmans]. La purification d’un groupe [les catholiques] chargé d’annoncer l’Evangile au monde et qui se sent proche de ceux qui cherchent aussi la paix et la justice. »

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