Je suis prêtre depuis dix-huit ans. L’âge de la majorité ? C’est le temps où l’on cesse enfin d’être considéré comme un « jeune prêtre ». Un temps bien trop court encore pour tirer des bilans et faire valoir une expérience, mais assez long déjà pour considérer avec un peu de distance le port d’où l’on est parti.
Le pape François « twitte ». Il le fait même presque tous les jours. Il demande également aux prêtres d’être présents à la périphérie. C’est en m’appuyant sur ces deux points que j’essaie, à mon humble manière, d’être un prêtre « selon le pape François ».
Le pape François cherche à concilier les différents bords de notre société et demande aux prêtres de s’atteler à la tâche. Mais quand il s’agit des difficultés concrètes que rencontrent les prêtres dans leur vie - en particulier en Occident - il n’apporte pas de réponses satisfaisantes.
Grand théologien allemand et philosophe de la religion, Romano Guardini (1885-1968) fut l’un des protagonistes du renouveau liturgique et spirituel de l’entredeux guerres. Au terme de sa vie, il s’est expliqué sur sa conception du sacerdoce (voir ci-contre). Sa pensée pourrait bien avoir éclairé celle du Père Bergoglio - futur pape François - qui lui a consacré sa thèse de doctorat.
A la lecture des passages du pape sur le ministère du prêtre, je retrouve, au plus profond de mon coeur, ces puissants mouvements de vie que j’éprouvais lorsque, jeune homme, je discernais ma vocation. Je reconnais le feu brûlant qui m’a conduit au Séminaire, les grands désirs qui m’ont mis en mouvement et que le temps tente d’anesthésier : oui, François parle bien du prêtre que je veux être, mais dont je suis tellement loin !
Peut devenir prêtre homme qui veut. Le chemin lui est tracé par la Tradition. Il devra, par contre, en choisir l’art et la manière, et c’est là sans doute que seront engagés sa foi et son discernement. Il y a autant de façon d’être prêtre que d’hommes qui endossent l’habit. C’est ce qui donne accès à la diversité des croyants. Mais en tant qu’homme d’Eglise, le prêtre doit aussi répondre à une vision et une mission communes. Que dit François à ce sujet ?
L’armée suisse manque d’aumôniers de milice. Les candidats se font rares parmi les prêtres, diacres, pasteurs et autres agents pastoraux laïcs déjà surchargés par leur ministère. Pourtant ce service répond à une injonction du pape demandant aux serviteurs de l’Eglise d’aller à la rencontre des gens aux « périphéries géographiques et existentielles ». Or l’armée leur permet de rencontrer des jeunes suisses qui n’ont que rarement, voire jamais, mis les pieds dans une Eglise.
Depuis son élection, le pape François s’adresse régulièrement aux prêtres. Un consistoire de cardinaux, une rencontre avec des séminaristes, une célébration liturgique du Jeudi Saint, une exhortation apostolique… à chaque fois le pape évoque à coups de formules bien frappées le portrait du prêtre dont le monde a besoin. Cette insistance laisse entendre qu’il s’agit bien d’une part importante de la réforme que tous attendent du pape argentin.
« Ce que j’aime chez François, ce sont les images et les exemples concrets qu’il emploie... »
Samedi soir, je[1] participais à un repas de mariage. C’est assez rare, mais je connaissais la mariée depuis fort longtemps, et sa famille aussi. Cela méritait donc une exception. Je me suis retrouvé placé à la table des cousins, autant dire de parfaits inconnus… Lorgnant ceux que je connaissais, sagement assis à leur table respective, je me demandais ce que je faisais là, entre ces deux cousines parlant entre elles en italien. C’est alors que je me suis rappelé les invitations du pape François : il faut sortir, aller vers les périphéries, à la rencontre des gens ! Eh bien ! je me suis dit que c’est ce qu’il fallait faire… J’ai commencé à discuter avec chacun et chacune, et ce fût une très belle soirée !
Ana Arabia, de Amos Gitai
Gemma Bovery, d’Anne Fontaine