Youth, de Paolo Sorrentino et Dheepan, de Jacques Audiard
Avec Youth, le réalisateur italien Paolo Sorrentino m’a procuré le même genre d’expérience jubilatoire qu’avec son film précédent, La grande belleza, chef-d’œuvre qui avait obtenu en 2014 l’Oscar du meilleur film étranger. Youth se passe presque intégralement dans un hôtel de luxe[1] à Davos, dans les Alpes suisses. C’est là que Fred et Mick, deux octogénaires américains, ont l’habitude de se retrouver.
Pour la deuxième édition d’Il est une foi, l'Eglise catholique romaine - Genève (ECR) donne rendez-vous à la population autour d’un riche programme : « 16 films, des débats et de belles occasions de rencontre ». Gérald Morin, qui fut pendant six ans l’assistant de Fellini, est le directeur artistique de la manifestation. Il explique les choix de cette édition, présentée sous le titre de Trouble : «Après avoir axé la programmation l’année dernière sur la période du Moyen Age, l’idée est de proposer une réflexion, à partir du cinéma, sur la situation de la religion catholique dans nos sociétés civiles : ce qu’elle apporte, comment elle est vécue de l’intérieur, les limites de l’institution quand elle est liée au pouvoir, etc.» Une situation qualifiée globalement de trouble.
Les nuits blanches du facteur,
d’Andreï Konchalovski
La Isla Minima,
d’Alberto Rodríguez
Quand à 77 ans, après une parenthèse hollywoodienne dans le genre film d’action[1], un réalisateur russe ayant débuté avec Tarkovski[2] revient à ses premières amours[3] - une forme mêlant documentaire et fiction -, cela donne Les nuits blanches du facteur, un film magnifique d’Andreï Konchalovski.
Le film Spotlight a obtenu l’Oscar du meilleur film, le dimanche 28 février 2016, à Los Angeles. Basé sur des faits réels, il est un film-enquête de facture classique, qui fait beaucoup parler de lui. Il relate avec minutie le travail d’enquête au long cours de l’équipe des journalistes du "Boston Globe" à propos des crimes de pédophilie commis par des prêtres à Boston et couverts par leur hiérarchie. Chroniqueur cinéma de choisir, Patrick Bittar nous livre son analyse objective :
Broadway Therapy, de Peter Bodganovich
Le labyrinthe du silence, de Giulio Ricciarelli
Dans ma chronique précédente, les citations d’Orson Welles étaient tirées d’un livre d’entretiens menés par Peter Bodganovich. Ce dernier a d’abord été critique de cinéma, puis réalisateur et comédien. Ceux qui ont vu la géniale série The Sopranos se souviennent de sa tête de Droopy aux grosses lunettes : il jouait le psy de la psy du mafieux dépressif Tony Soprano. En tant que réalisateur, son film le plus célèbre - La dernière séance - remonte à 1971, et son dernier long-métrage date d’il y a 13 ans. A 75 ans, il revient avec She’s funny that way (« traduit » Broadway Therapy par les distributeurs français), une comédie américaine à la mode d’antan.
Le scandale Paradjanov,
de Serge Avédikian et Olena Fetisova
Hayk : Evasion,
de Harutyun Khachatryan
L’Enquête,
de Vincent Garenq
Il est difficile d’être un dieu,
d’Alexeï Guerman
Queen and Country,
de John Boorman
Adieu au langage,
de Jean-Luc Godard
Timbuktu, d’Abderrahmane Sissako
Mr. Turner, de Mike Leigh
Interstellar
de Christopher Nolan
Paradise Lost
d’Andrea Di Stefano
Quelque part dans le Midwest américain, dans un futur proche. Le climat a été tellement déréglé qu’aucune production agricole n’est possible. L’humanité est menacée d’extinction. Heureusement la NASA veille ; en particulier le professeur Brand (Michael Caine) qui, à force d’écrire des formules mathématiques sur de grands tableaux noirs, a découvert le moyen de tirer parti d’une faille repérée dans l’espace-temps : un « trou de ver ».
Se plonger dans la biographie d’Orson Welles, qui aurait eu 100 ans le 6 mai s’il avait survécu, est proprement fascinant. Cet artiste a vécu nombre de vies invraisemblables. Ses exploits d’enfant à eux seuls valent le détour. Ne déclara-t-il pas lui-même, qu’enfant, il voulait échapper à l’enfance, mais qu’une fois celle-ci quittée, il ne cessa d’y retomber… Comment parler alors de ce personnage incontournable et haut en couleurs du cinéma américain, sans tomber dans la surenchère ou la démesure ? Notre chroniqueur cinéma Patrick Bittar s’y essaye. Un article paru dans le numéro de mai de choisir, à déguster ici.
Orson Welles combinait le sens artistique de sa mère, une pianiste de concert, et le côté intrépide et visionnaire de son père, un inventeur farfelu qui aimait voyager. Il disait : « Les cinéastes passent trop de temps dans les salles obscures. Moi, pour être heureux, j’ai besoin de me sentir comme Christophe Colomb, j’ai envie de découvrir l’Amérique. Les bonnes choses devraient être DÉCOUVERTES, dans cet esprit de la première fois. Dès que je mets le pied sur un plateau, j’ai envie d’y planter un drapeau. Or plus j’en sais sur les découvertes audacieuses qui m’ont précédé, plus mon drapeau me paraît ridicule... »
Winter Sleep, de Nuri Bilge Ceylan
Aydin, comédien à la retraite, tient l’Othello, un petit hôtel en Anatolie centrale. Il tire également des revenus d’autres biens immobiliers, qu’il loue depuis toujours à quelques familles pauvres du coin. A mesure que l’hiver s’installe, le notable local se trouve confronté à l’hostilité sourde de certains habitants, et, à l’intérieur de l’hôtel qui se vide, aux reproches perçants de sa sœur Necla et de sa jeune épouse Nihal. La première était venue se réfugier à l’Othello après son divorce. La seconde s’était lancée dans l’aide humanitaire de proximité pour ne pas sombrer dans la dépression.
Dans son septième film, Nuri Bilge Ceylan fait preuve de la maîtrise plastique qui lui est coutumière. Mais les trois heures de Winter Sleep sont d’une densité et d’une plénitude qui en font son œuvre la plus aboutie : comme dans un roman de Dostoïevski, le film captive progressivement, en tissant les rets de discordes intimes ou sociales.
Le cinéaste turc s’est toujours intéressé aux citadins cultivés un peu superficiels, aux esthètes dépourvus d’enthousiasme, aux intellectuels sans courage, aux moralistes sans droiture, aux individus socialement libres mais enfermés dans leur égoïsme, aux êtres dont le sentiment de supériorité n’a d’égal que leur mesquinerie, aux amants séduisants, trop secs pour aimer vraiment. Dans Winter Sleep, on retrouve ces personnages las, cyniques et pathétiques, dont les silhouettes minuscules se perdent dans les paysages insolites de Cappadoce comme dans les tableaux romantiques de Caspar David Friedrich.
Ceylan - qui se dit un « grand mélancolique » attaché à traquer « tout ce qui se dérobe » - met en scène ces disputes froides et étouffantes, ces jeux de massacre où aucun personnage n’est en reste, avec une justesse qui rappelle certains films de Bergman. « Ta grande morale te sert à haïr le monde entier, dit Nihal à son mari. Tu détestes les croyants parce que croire, pour toi, est un signe d’archaïsme et d’ignorance. Tu détestes les non-croyants parce qu’ils n’ont ni foi, ni idéal. »
Lorsqu’il a reçu la Palme d’or à Cannes, le réalisateur a dédié son film à la jeunesse turque et - de manière significative - à ceux qui ont « perdu leur vie » dans les mouvements contestataires.