Semblable aux Lettres persanes de Montesquieu, ce conte, paru en 1923, relate les tribulations d’un potentat oriental d’un pays imaginaire entre la Perse et l’Inde. Assoiffé de richesses, il vient à Paris pensant y trouver tout l’argent recherché.
L’auteur, qui se cache sous le pseudonyme de Karagueuz Effendi (que l’on pourrait traduire par «Maître Guignol»), n’est autre que Jacques de Morgan (1857-1924), explorateur égyptologue et iranologue. Il nous offre une farce ou parodie des mœurs des institutions de son époque, aussi bien françaises qu’orientales. On pourrait tout aussi bien transposer ce conte dans l’actualité présente, avec des mœurs plus subtiles mais ô combien réelles.
Quelques heures de lecture pour se détendre entre deux lectures plus sérieuses!
Karagueuz Effendi
Le Chah du Mahboulistan
Histoire orientale
Genève, Olizane 2017, 241 p.
édition 690, qui porte notamment sur la notion du "chez soi", un extrait remanié de Vives clartés d'André Durussel (à paraître en 2019). Le poète et essayiste vaudois évoque ici la vision de l'enracinement de différentes figures de la littérature, avant de donner la sienne à travers le récit de trois maisons qui ont contribué à forger son identité d'homme et d'auteur romand. Un texte qui nous mène de La Vallée de Joux à Tolochenaz, en passant par La Rippe. Un pays de Vaud au siècle dernier qu'il dépeint avec tendresse.
Choisir vous propose en marge de sonIl est loin ce temps où Jean Dubuffet espérait la reconnaissance de «l’art des fous» et des marginaux. Le formidable engouement qu’il suscita a entraîné avec lui la quête de nouveaux territoires. À l’Europe centrale succède depuis une dizaine d’années le Japon, auquel s’attache la Collection de l’Art brut à Lausanne dans une exposition qui regroupe vingt-quatre créateurs jusque-là inconnus en Europe.
Art brut du Japon, un autre regard, jusqu’au 28 avril, Collection de l’art brut, Lausanne
Art brut japonais II, Halle Saint-Pierre, Paris, jusqu’au 10 mars
Que se passe-t-il donc dans nos sociétés? Pourquoi les crises se multiplient-elles, alors que jamais on a tant œuvré pour la liberté et le bonheur? Parce que la modernité dérègle la relation au monde, «c'est-à-dire la manière dont les sujets que nous sommes font l'expérience du monde et prennent position par rapport à lui».
La réponse que propose Rosa, dans son ouvrage qui fait déjà référence Résonance: une sociologie de la relation au monde (la Découverte 2018), peut sembler surprenante. Mais qui lira attentivement le philosophe et sociologue allemand découvrira qu'elle permet de rendre compte d'une multitude de phénomènes ambiants déroutants, apparemment sans liens entre eux. Il comprendra mieux ce qu'il vit lui-même, par exemple dans son rapport à la nature ou à la musique. Et il en sera convaincu à son tour: c'est bien là l'un des nœuds du problème. Mieux encore, il pourra peut-être faire sien ce credo optimiste de l'auteur: «Une autre façon d'être-au-monde, une autre forme de relation au monde est possible», gage d'une vie meilleure.
Jacques Légeret
L’énigme amish
Vivre au XXIe siècle comme au XVIIe
Genève, Labor et Fides 2017, 304 p.
Quand on nous parle des amish, des images surgissent: carrioles tirées par des chevaux, chapeaux de paille pour les hommes, coiffes blanches pour les femmes… et des kilts de toute beauté. «La culture amish ne dispense aucun discours, aucun enseignement écrit ou oral.» Aussi est-il précieux de lire le livre de Jacques Légeret. Journaliste indépendant qui vit à Paudex (VD), il se fait le témoin privilégié de cette «contre-culture, en opposition quotidienne avec la culture technologique individualiste américaine».
Jean Corminboeuf
Pierre de Céresole - Le dernier saint vaudois?
T1, Jongny, A-Eurysthée 2017, 208 p.
Le préfacier Alain Clavien rencontra incidemment à la Bibliothèque de Dorigny l’auteur de ce livre, plongé dans des correspondances d’écrivains. Des échanges s’en suivirent. L’auteur passa des jours et des jours à dépouiller la vingtaine d’écrits publiés du vivant de Pierre Céresole (1879-1945), dernier saint vaudois (du canton de Vaud et non de la communauté des Vaudois du Piémont), deux livres posthumes, des études diverses faites sur lui et une partie des 54 cartons contenant le Fonds Pierre Céserole.
Adriana Destro et Mauro Pesce
Le récit et l’écriture
Introduction à la lecture des évangiles
Genève, Labor et Fides 2016, 200 p.
Cette introduction à la lecture des évangiles s’attache à la réalité du récit et à celle de l’écriture dudit récit, deux réalités qui s’entrecroisent plutôt qu’elles ne se succèdent. L’angle pris pour l’analyse est nouveau: comment les informations sur Jésus se sont-elles transmises, par qui et où? Quelles transformations ont-elles subies et dans quels contextes?
Angela Pellicciari
Les papes et la franc-maçonnerie
Une opposition séculaire
Perpignan, Artège 2017, 408 p.
Traduction d’un livre paru en Italie en 2007, cet ouvrage a un grand mérite, mais appelle un complément.
Michel Maxime Egger
Écospiritualité
Réenchanter notre relation à la nature
et
Sous la direction d’Alexander Tedereau
Les transitions énergétiques
Les fondements d’un monde nouveau
coll. Concepts, Genève/Saint-Julien-en-Genevois, Jouvence 2018,
respectivement 128 p. et 124 p.
Face à la crise écologique actuelle, Michel Maxime Egger, sociologue, écothéologien et acteur engagé dans la vie civile, nous invite à la lucidité, au changement de paradigme et à relier les écologies intérieure et extérieure. En six chapitres (Relier écologie, sciences et religions; Réenchanter la nature; Redécouvrir la sacralité de la Terre; Être un pont entre terre et ciel; Transformer son cosmos intérieur; Devenir un méditant-militant), il nous propose d’éveiller notre conscience, de nous ouvrir à l’espérance pour une société écologique, juste et résiliente.
Joanna Macy et Chris Johnstone
L’espérance en mouvement
Genève, Labor et Fides 2018, 312 p.
Ce livre, publié aux États-Unis en 2012 par deux figures emblématiques de l’écopsychologie, nous remet une nouvelle fois face à la réalité: «Chaque jour, nous perdons des parties précieuses de notre biosphère, tandis que des espèces disparaissent et que des écosystèmes sont détruits. (…) Étant donné que l’extraction de l’eau douce se fait à un rythme plus rapide que son réapprovisionnement, les puits autour du village se dessèchent. (…) En raison de la surpêche, les stocks de nombreuses espèces autrefois communes (...) sont en forte baisse.» Ou encore: «plus de 630 millions de personnes vivent à moins de dix mètres au-dessus du niveau de la mer. Si les calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique occidental continuent à fondre, la montée des eaux inondera Londres, New York, Miami, Mumbai, Calcutta, Sidney, Shanghai, Jakarta, Tokyo, et bien d’autres métropoles.»
Eric Fuchs
Entre insouciance et responsabilité
Quel sens donner à sa vie
Bière/Divonne-les-Bains, Cabédita 2017, 96 p.
L’Évangile nous invite à vivre «de cette étrange combinaison entre insouciance et responsabilité», affirmation contradictoire dont la Bible est coutumière. Ce «nœud de sens» est à examiner à la lumière du lien qui nous unit au Christ, pour vivre «comme, avec, pour et en Christ»: imitation, compagnonnage, service et communion.
René Lenoir
Le chant du monde est là
Paris, Albin Michel 2017, 138 p.
Le titre pourrait laisser penser qu’il s’agit d’une énième poésie spirituelle glorifiant la communion avec la Nature et le Cosmos. Ce n’est pas que cela, c’est aussi une relecture spirituelle d’une vie vécue dans les bouleversements politiques que la France a connus au long du XXe siècle.