Christian Bernard est né à Strasbourg en 1950. Concepteur et directeur du Musée d'art moderne et contemporain de Genève (Mamco), il est l'ancien di - recteur de la Villa Arson à Nice et critique d'art. Il poursuit depuis des années une intense activité de poète.
Alain Fournier, Le Grand Meaulnes
Paris, Flammarion
2014, 290 p.
« Mon credo en art : l’enfance. Arriver à la rendre sans aucune puérilité, avec sa profondeur qui touche les mystères. Mon livre futur sera un perpétuel va-et-vient insensible du rêve à la réalité. Rêve entendu comme l’immense et imprécise vie enfantine planant au-dessus de l’autre et sans cesse mise en rumeur par les échos de l’autre. »
Art épistolaire, art perdu ? On n'écrit plus de lettres, de même qu'on ne se bat plus en duel : deux conséquences d'une même cause, on n'a plus le temps. Le travail tient nos nuques courbées sur nos écrans comme des galériens sur leurs rames. A-t-on encore le temps de parler à Dieu et aux femmes, de faire son examen de conscience, de dire ses prières ?
L'écrivain français a toujours eu un peu honte de n'être qu'un homme de lettres. Beaucoup ont été tentés par la politique. Sinon par la politique active, ils ont du moins éprouvé le besoin de dire leur mot sur les affaires publiques. Sous forme pamphlétaire (genre très français) ou autre. Cette mode ou cette maladie commence avec Voltaire. Chateaubriand, Lamartine, Hugo, Barrès ont suivi et la liste n'est pas close.
Gilles F. Jobin, Jouer dans le noir,
Genève, Samizdat 2013, 84 p.
Gilles F. Jobin est né en 1948 à Bon - court (Jura) et vit à Delémont. En 2013, il publie son premier livre, composé de 73 vignettes en forme d'autobiographie, de fictions et d'éléments d'actualité. N'a-t-il pas eu le temps d'écrire avant ? Ou n'a-t-il pas connu l'envie ou la nécessité de publier ? Traversé par l'exigence et la tendresse de dire, son recueil est un condensé d'humanité. Et l'homme, un véritable poète.
Sylvain Thévoz : Votre recueil, ce sont 73 textes courts, de même dimension. Travaillez-vous « sous contrainte », qu'elle soit formelle ou stylistique ? Comment structurez-vous vos poèmes ?
Elève des jésuites comme Descartes et fils d'un tonnelier de Langres, Diderot fréquente les cafés et, comme plus tard Musset, il observe les joueurs d'échecs à la Régence. A trente ans, il épouse la fille d'une lingère et reçoit du libraire Lebreton la direction de l'Encyclopédie. Il est une espèce de touche- à-tout avec des parties de grandeur et d'autres d'abjection, mais sa verve et son allant font presque tout passer.
Albert Camus fait partie avec Jean-Paul Sartre de la génération des hommes sans Dieu ou des hommes de la mort ou du meurtre de Dieu de l'immédiat après-guerre. En ce temps-là les mots de Dieu, de métaphysique, d'athéisme et même d'humanisme étaient encore chargés de dynamite et de mystère. Ils n'avaient pas été banalisés, vulgarisés, démonétisés et laminés par la langue journalistique et publicitaire qui a cours aujourd'hui. La société de consommation n'en était qu'à ses vagissements. L'homme avait encore les yeux levés vers le Ciel ou du moins se souvenait de les avoir eus.
Classique de la littérature jeunesse, lu et relu par des générations de parents, « Le Petit Prince » plonge son lecteur dans un univers de rêve et de magie. En nous dévoilant les mystères de l'enfance, il contribue à donner une vision plus essentielle de notre âme et nous rappelle, à la veille de Noël, qu'« on ne voit bien qu'avec le coeur. L'essentiel est invisible pour les yeux ».
Virgile, L'Enéide, traduit par Paul Veyne,Paris, Albin Michel 2012, 480 p.
La tragédie antique nous montre la guerre entre les dieux et les hommes, guerre qui n'existe pas chez Homère, et qui n'est déclarée que lorsque les hommes, devenus philosophes et ayant cessé d'être des guerriers, se regimbent contre les dieux, leur caprice et leur arbitraire, et entreprennent de moraliser le Ciel.
G.K. Chesterton, William Blake, traduit par Lionel Leforestier, Paris, Le promeneur 2011, 176 p.
Gilbert Keith Chesterton, Une brève histoire de l'Angleterre, traduit de l'anglais par Gérard Joulié, Lausanne, Le Revizor/ L'Age d'homme 2012, 232 p.
Que G.K. Chesterton, le flamboyant champion du catholicisme intégral, absolu, militant et triomphant, le papiste défenseur acharné du dogme, se soit intéressé à William Blake, l'ennemi des rois, des docteurs et des prêtres, à Blake le prophète et l'hérésiarque protestant, au point de lui consacrer tout un livre, voilà qui de prime abord peut sembler paradoxal. Mais Chesterton n'est pas à un paradoxe près. D'ailleurs, avant sa conversion officielle au catholicisme, Chesterton était un radical, un protestant, donc un hérétique de la famille de Blake et, osons le mot, un prophète, ce qu'il est toujours resté même sous sa nouvelle étiquette.
Nathalie Chaix vit à Genève. Elle travaille dans le domaine de la culture et a publié trois romans aux éditions Campiche (Orbe), trois romans vrais, qui pèsent leur poids de désir, d'espace et d'invitation à entrer dans la splendeur des relations.
Le poète vaudois Philippe Jaccottet entre de son vivant dans la collection littéraire de La Pléiade. C'est le quatrième auteur suisse à être publié dans cette prestigieuse édition, après Rousseau, Cendrars et Ramuz.
Né à Moudon en 1925, installé avec sa femme à Grignan, dans la Drôme, depuis 1953, Philippe Jaccottet a élaboré lui-même, avec l'étroite collaboration de la poétesse et éditrice José-Flore Tappy, ce 594e volume de la Bibliothèque de La Pléiade. L'ouvrage (1650 pages) couvre un demi-siècle d'écriture, soit 28 recueils de prose ou de poésie, présentés dans un ordre chronologique : de L'Effraie (1953), à Couleur de terre (2009), en passant par La promenade sous les arbres, Paysages avec figures absentes, A la lumière d'hiver et La semaison.
Jaccottet aura servi abondamment la littérature. En tant que poète, mais aussi en tant que traducteur (Rilke, Musil, Goethe, Leopardi, Hölderlin...). Avec, au cœur de sa démarche, la quête de la justesse (voir l'article de Mathilde Vischer, ci-dessous en PDF).