Lorsque la démence «explose le temps, la logique, qu’elle rétrécit l’espace et rompt le dialogue», qu’elle envahit le champ de l’amour, les questions taraudent celle qui a accompagné son mari dans la maladie pendant dix ans. «Où vas-tu? C’est quoi aimer? C’est quoi un homme lorsqu’il perd la conscience de lui-même? Est-ce qu’il est encore quelqu’un?...» Elle «creuse la matière jusqu’à l’absurde», pour rester debout, vivante.
Christine Rebourg-Riesler
Le crépuscule d’un homme
Les Plans-sur-Bex, Balland 2018,
104 p.
Derrière l’acteur, l’homme. Celui que l’on devinait caché sous les nombreux rôles qui nous ont enchanté lève un peu le voile. L’ancien directeur du Théâtre des Amis à Carouge se livre avec pudeur. Évoquant un été passé en compagnie de son grand-père, en Catalogne, Raoul Pastor laisse entendre quelque chose de lui-même.
Raoul Pastor
Un été avec Geronimo
Genève, Slatkine 2019, 136 p.
Voici le témoignage bouleversant d’une femme, mère de trois enfants qui, à l’âge de 40 ans, se voit diagnostiquer un cancer rare, très grave. Après avoir été à plusieurs reprises proche de la mort, de l’avoir même sentie, elle peut, quinze ans après, témoigner de tout ce qu’elle a appris: s’écouter, se faire confiance et trouver le chemin.
Sylvie Staub
Cellules je vous aime
Récit d’une guérison inattendue
préface de Rosette Poletti
Bière, Cabédita 2019, 272 p.
La théologienne Marion Muller-Colard nous entraîne toujours dans les profondeurs du cœur et ne rate pas une occasion pour donner à la réalité un sens pour plus d’humanité. Elle part à la rencontre de Nikola Zaric, sculpteur lausannois décédé en 2017. Voici ce qu’en dit Wikipedia: «Zaric apprécie la frontière floue séparant l’homme de l’animal; il désire créer une relation entre un no man’s land et un animal’s land, entre zoomorphisme et anthropomorphisme, tout en s’efforçant d’allier ses connaissances scientifiques à une approche poétique et artistique.»
Marion Muller-Colard
L’éternité ainsi de suite
Genève/Paris, Labor et Fides/Bayard 2019, 72 p.
«Peindre avec les mots cette réalité invisible que nous appelons âme», c’est la tâche qu’a affronté l’auteure, universitaire franco-italienne, spécialiste des écrits mystiques médiévaux et de l’âge baroque. Nous côtoyons Benoît de Canfield, Jacob Böhme, Madame Guyon, Hadewijch d’Anvers, Laurent de Paris, François Malaval, Jean-Jacques Olier, Marguerite Porete, Jan van Ruusbroec et Angelus Silesius, des auteurs des XIIIe, XVIe ou XVIe siècles, animés par l’énergie spirituelle qui est «lumière qui traverse le cristal de leur âme».
Mariel Mazzocco
Le joyau de l’âme
Diamants et autres gemmes mystiques
Paris, Albin Michel 2019, 198 p.
Quel auteur spirituel a-t-il été cité avec admiration par Heidegger, Lacan, Derrida et de nombreux autres penseurs modernes de premier plan? Angelus Silesius. Le nom fait peut-être sourire, mais aimeriez-vous en savoir plus sur celui qui a écrit: «La rose est sans pourquoi»? Alors laissez-vous guider patiemment par Jacques Le Brun, spécialiste reconnu de la mystique du XVIIe siècle.
Jacques Le Brun
Dieu, un pur rien
Angelus Silesius, poésie, métaphysique et mystique
Paris, Seuil 2019, 240 p.
Il neigeait en hiver (phénomène rare méritant d’être signalé). J’attendais de traverser un carrefour, quand soudain je remarquai que les traces des pneus laissées par les voitures matérialisaient une espèce de grand losange. Depuis le début de la matinée, aucun véhicule n’était passé au centre du carrefour, ni le long du trottoir. Si aucun automobiliste ne roulait à cet endroit et si aucun piéton ne marchait là-bas non plus, à qui servait cet espace? À personne! Un morceau de ville pour personne.
Écrivain pour la jeunesse et pour adultes, parolier, animateur d’ateliers d’écriture à l’Institut littéraire suisse, le vaudois Eugène Meiltz, de son nom de baptême, joue ses propres textes sur scène depuis une dizaine d’années.
Chaque trimestre, la revue choisir présente une sélection de recensions d'ouvrages.
Après avoir été censuré dans les années 60, voilà Markus Imhoof récompensé. Le Prix d’honneur du cinéma suisse 2020 lui sera attribué l’an prochain lors des Journées cinématographiques de Soleure. Selon un communiqué de l’Office fédéral de la culture, Imhoof «a eu une influence décisive sur le cinéma suisse. Révélateurs, ses films suscitent l’empathie et appellent à la réflexion et à la remise en question.»
Patrick Bittar est réalisateur de films et chroniqueur cinéma pour choisir depuis 2012, il est aussi directeur de l’Association suisse des Amis de Sœur Emmanuelle (ASASE).
«Très populaire dans tout le nord de l’Europe, peu connu dans le monde francophone, Pierre Canisius est une des figures les plus impressionnantes des débuts de la Compagnie de Jésus. Sans appartenir à la génération des fondateurs, il est le type même du jésuite ordinaire.» C’est ce que relève Pierre Emonet sj, directeur de notre revue, dans l’ouverture de son récent ouvrage consacré à Pierre Canisius - L’infatigable réformateur de l’Église d’Allemagne (1521-1597) qui vient de paraître aux éditions Lessius.
Alors qu’on assiste à la montée des nationalistes, l’Europe de l’entre-deux-guerres sème les ferments d’un art libre et foisonnant. La vague mortifère liée à la guerre et aux ravages de la grippe espagnole n’est pas sans résonance avec la crise économique et sanitaire que traverse l’Europe d'aujourd'hui. C’est tout du moins ce que tente de démontrer le Kunsthaus de Zurich, dans une exposition qui souligne la permanence d’un héritage, cela dans tous les domaines de la création. L'exposition conjugue ainsi monde d’avant et monde d’après de l’effervescence des années vingt à Thomas Ruff.
Semer à tout vent, les années folles
jusqu’au 11 octobre, au Kunsthaus Zürich.
Dieu, le diable et la femme sont les trois principaux protagonistes de l’œuvre de Huysmans qui se déroule dans le Paris des messes noires, des sabbats de femmes hystériques, de prêtres diaboliques de la fin du XIXe siècle, toutes choses qui à l’esprit cartésien et jacobin d’un homme d’aujourd’hui semblent être des accessoires de mélodrame. Et cependant un homme comme Paul Valéry goûtait et prisait Huysmans. Valéry, qui avait reçu une éducation catholique, aimait les femmes et sans croire au dieu de Pascal pensait que le diable était un personnage sans lequel on ne fait pas grand chose. L’auteur de Mon Faust était-il hégélien à son insu?
JK Huysmans
Romans et nouvelles
Pléiade numéro 642
Paris, 2019 Gallimard, 1856 p.