Jean-Michel di Falco, Timothy Radcliffe et Andrea Riccardi (dir.)
Le livre noir de la condition des chrétiens dans le monde
Avec la collaboration de 70 contributeurs, ouvrage coordonné par Samuel Lieven,
Paris, XO Editions 2014, 814 p.
Collectif, Aimer c'est tout donner. Témoignages
Fribourg/St-Maurice, Association La Vie consacrée/Saint-Augustin 2015, 220 p.
Jean-François Gayraud
Le nouveau capitalisme criminel
Paris, Odile Jacob 2014, 360 p.
Chantal Reynier
Pierre-Joseph de Clorivière 1735-1820. Un mystique jésuite contre vents et marées
Namur, Lessius 2014, 440 p.
Yves Ledure
Sécularisation et spiritualité. Approche anthropologique du christianisme
Bruxelles, Lessius 2014, 171 p.
Marc Leboucher, Bach, texte inédit, Paris, Gallimard 2013, 372 p.
Michel Cornu, Aux portes de l'indicible. Incarnation et musique, Lausanne, L'Age d'homme 2013, 320 p.
Vincent Robin-Gazsity, L'art d'user ses babouches. Tribulations sur la Route de la Soie, photographies de Florian Molenda, Genève, Olizane 2014, 312 p.
Maurice Bellet, L'avenir du communisme, Paris, Bayard 2013, 160 p.
D'emblée, l'auteur nous avertit qu'entre la liste des progrès fulgurants et admirables de l'humanité et celle désolante des formes de destruction, entre l'espoir et le désespoir, il choisit l'espérance qui ne se résigne à rien de ce qui meurtrit ou détruit les humains.
Ceci dit, la crise dans laquelle on vit est absurde : un milliard d'humains souffre de la faim et l'on jette à peu près le tiers de la production agricole. L'argent étrangle tout et on est menacé d'un mal que l'auteur nomme hébétude. C'est parce qu'il croit qu'il y a dans l'humanité de quoi surmonter ses désastres et ses folies, qu'il est prêt à affronter, avec cette étude, la gravité du mal et à sonder l'espérance qu'a été le communisme (changer à la fois le monde et l'homme, viser une fraternité universelle ; volonté d'une régénération qui serait liberté et création).
Son étude est divisée en deux parties. Dans la première, Maurice Bellet analyse les faiblesses de la démocratie, les intégrismes, les malheurs du communisme, le complexe de l'Occident avec son délire et sa violence. La deuxième ouvre le regard sur ce qui réunit les humains et sur la volonté d'une stratégie et d'une gouvernance en mutation.
La fameuse devise de la République française ne comportait au début que Liberté et Egalité. La Fraternité ne fut ajoutée qu'en 1848, lorsque parut le Manifeste de Marx. L'auteur, prêtre, psychanalyste, théologien et philosophe, analyse avec brio ces trois termes, alors que le mot révolution revient à la mode. Il s'interroge sur l'homme moderne, partagé entre passion et ténèbres et devenu une sorte d'apprenti sorcier (là, c'est le psychanalyste qui parle) ; sur les droits de l'homme, qui risquent l'équivoque ; sur la jouissance du pouvoir, ce grand tentateur. Comment mixer science, technique et économie ? La première partie se termine par un exercice imaginaire effrayant.
La deuxième partie questionne les voies de sortie. L'auteur souligne que ce qui est commun à tous les humains, c'est le dialogue. Il faut donc tenter d'offrir un lieu de partage, où l'acceptation des différences serait la substance même de l'unité. Faire un grand bond vers la Bible, où retentit l'espoir fou d'une libération de l'oppression (il semblerait que cet espoir soit propre à l'Israël de la Bible). Si la Grèce antique interroge, explique Maurice Bellet, dans l'Evangile on n'a jamais fini d'apercevoir la profondeur : ce mouvement souterrain charrie mille choses, parfois contradictoires, dont il importe de percevoir l'unité.
« L'avenir du communisme, c'est l'immense espoir d'une humanité délivrée de ce qui la détruit et capable de mener plus loin la puissance qu'elle s'est découverte, que cet espoir soit repris en descendant plus bas, jusqu'en ces processus noirs qui ont compromis le communisme lui-même, pour passer par-delà. »
Nathalie Becquart, Yves de Gentil-Baichis, L'évangélisation des jeunes, un défi. Eglise@jeunes2.0, Paris, Salvator 2013,122 p.
Lors de sa dernière année d'études de HEC, au cours d'un week-end d'initiation à la prière ignatienne, Nathalie Becquart vécut une expérience spirituelle très forte qui lui fit choisir la vie religieuse chez les xavières. Devenue directrice du Service national pour l'évangélisation des jeunes de France et responsable de la pastorale étudiante, elle a acquis la conviction profonde que les jeunes peuvent être les premiers acteurs de la nouvelle évangélisation. Elle nous rend attentifs au fait que nous assistons à une révolution culturelle et anthropologique considérable, qui concerne autant l'Eglise que la société.
La première caractéristique des jeunes, c'est d'être connectés. Ils ont grandi la souris à la main et leur appartenance première, avant celle à tel pays ou à telle ethnie, est à l'humanité. Ils sont branchés sur l'ailleurs et vivent dans l'aujourd'hui. Pourtant, reconnaît-elle, 20% des jeunes en France ne s'adaptent pas ou peu à ce monde et sont largués, 21% vivent sous le seuil de la pauvreté et 25% sont au chômage. Car ce qui est déterminant, ce sont les diplômes, et là les inégalités sont très fortes. Ceux des banlieues, qui échouent dans leurs études, dans leur recherche de travail, n'ont souvent d'autre solution que la violence des trafics ou l'investissement dans des pratiques religieuses qui peuvent leur communiquer fierté et cohérence. Pour ces jeunes, partage et solidarité sont des valeurs auxquelles se raccrocher.
Ainsi, ceux qui entre 18 et 30 ans deviennent croyants, n'entreprennent pas cette démarche pour imiter des parents ou leur faire plaisir, mais par choix personnel. Ce qui leur parle le plus, c'est la dimension de fraternité universelle (ils sont très branchés sur les questions de solidarité) et donc Taizé, où l'on pratique une vraie pédagogie de la prière pour initier au silence et au partage.
Partant de son rôle à l'aumônerie, Sœur Becquart confie à Yves de Gentil-Baichis, journaliste au quotidien La Croix, comment l'Eglise aide les étudiants dans leur recherche de logements ou de stages, ou lors de leurs examens en proposant, par exemple, des séjours de révision à l'aumônerie ou dans une abbaye. Mais, souligne-t-elle, l'écoute ne se fait pas uniquement dans un bureau ; elle passe souvent par un vivre ensemble, que ce soit dans le cadre d'un camp, d'un pèlerinage, d'une croisière-retraite, d'entrée en prière ou de JMJ.
Les jeunes, dit-elle encore, ont peur d'un engagement définitif, et apprendre le chemin de la fidélité se fait à travers des épreuves, que ce soit au sein des couples ou au cœur d'une vocation religieuse. Il faut les aider à poser des repères et à opérer un vrai discernement dans la liberté.
Dans ce dialogue avec son interviewer, la religieuse xavière, ayant à peine dépassé la quarantaine, révèle un enthousiasme certain et porte un regard plein d'optimisme sur le monde.
Sylvoisal, Chansons de geste, Le Cadratin, Vevey 2014, 76 p.
« Homme sans descendance sous un plafond d'ancêtres, à d'autres qu'à mes chiens, que pourrais-je bien dire » ? Ces 76 pages d'une poésie en prose, chant épique aux temps préchrétiens d'Orient, entraînent le lecteur dans une somptueuse évocation.
L'époque est sauvage et sans compromis, l'ordre qui préside aux destinées est immuable, tant dans sa cruauté que dans ses révélations. Temps de guerres, de conquêtes, de jougs et d'esclaves, de lignées. Temps absolu. Les mots du poète sont des arcs tendus, ils sont d'une force toujours renouvelée au fil des pages. Chanson de geste, la geste d'une épopée, le chant d'une fresque humaine et d'une quête folle : conquêtes, croisades. « Allez ! Allez ! Gens de partout, venus d'ailleurs, mes serviteurs, dites aux ronces, dites aux pierres et aux orties, dites aux crapauds et aux lézards, aux orvets, aux vipères : "L'homme né de la femme et qui monte à cheval naîtra demain de Dieu !" »
Chant prophétique dans une langue sublime, auprès de laquelle le mot poésie sonne mièvrement. « Je veux qu'on crucifie mille éléphants ce soir aux portes de Carthage, disait Scipion », le vainqueur de Carthage. A ces grandes épopées, il est rendu tribut d'un seul jet. Au sort des femmes, dans ces temps violents, comme à celui du tyran ou du vaincu.
Au fil des lignes, les yeux écarquillés, on avance dans des incantations et des récits qu'Homère, Pasolini ou Shakespeare, qui n'avaient pas peur de raconter sans fard, auraient aimés. Il y a de l'ogre dans cette prose, du Hannibal ou du Richard III dans ces images d'un ordre antique. Mais l'odeur des lys, la fuite d'un cheval au galop, la brebis blessée qu'on tient dans ses bras, l'amour pur entre amant et amante, tout cela est aussi dans ces lignes qui secouent le lecteur, dans un style qui vise sa cible d'un coup. « Le roi rentrait de guerre au son du tambourin, et l'aigle au vol rapide annonçait sa venue. »
Le deuxième récit conte le passage d'un royaume à l'autre : celui des guerres (car tels étaient les temps anciens) à celui de Dieu, des dieux. Tel ce roi qui ordonnait en tout et qui finit dans le reniement des fastes et du pouvoir, optant pour l'ascèse et le rien, qui est tout. Le récit s'intitule Qu'un chant pour lui se fasse entendre, celui qu'un scribe au crâne rasé raconte en donnant la parole à des femmes, servantes ou reines, qui ponctuent les faits comme un chœur antique. On est là dans une poésie strophique, proche du verset claudélien. « Après le meurtre et la luxure, voici l'honneur et le désert et le pain qu'on mendie. »
Entre les deux longs chants épiques, un poème, Chanson, qui condense en une forme plus contrainte (l'octosyllabe) les mêmes thèmes. Estourbissant. Edité aux Presses du Cadratin, chez l'un des derniers artisans imprimeurs.
Giovanni Miccoli, Les anti-conciliaires. Les lefébvristes à la reconquête de Rome, texte traduit de l'italien par Bruno Clarot sj et Christine De Paepe (†), et revu par Benoît Malvaux sj.
Edition française augmentée, Bruxelles, Lessius 2014, 408 p.
Voici un livre important qui retrace l'histoire du schisme de Mgr Marcel Lefebvre et de la Fraternité Saint-Pie-X,[1] depuis l'époque du concile Vatican II jusqu'aux tentatives de réconciliation sous le pontificat de Benoît XVI. L'auteur, ancien professeur d'histoire à Trieste, s'est déjà illustré par une contribution à l'Histoire du Concile Vatican II.[2]